Si sur le plan de la structuration, le film est bien maîtrisé et est aussi bien rythmé, le fond du discours recycle le point de vue habituel sur le sujet construit sur un parti pris discutable. En effet, le film voudrait se poser comme un regard objectif sur ce qui se joue dans le système scolaire au niveau des zones sociales les moins favorisées. Pourtant les choix de mise en scène révèlent bien les a priori sur lesquels le film est bâti. D'une, le lieu "école" est assimilé à un lieu d'incarcération : les scènes de récré sont toutes filmées en plongée avec un angle de vue qui accroit l'étroitesse d'une cours rectangulaire, rappelant par là, des plans souvent utilisés dans les films de prison. Ajoutez à cela, le fait que jamais les sorties ou les entrées d'école ne sont filmées, jamais, on ne voit les élèves venir ou sortir de l'établissement vers une vie extérieure, et donc insidieusement, l'école est assimilée à un établissement carcéral. Bien entendu, cette présentation insidieuse, pour ne pas dire subliminale, à un but : présenter l'école comme un lieu d'oppression et donc justifier l'attitude insolente et indisciplinée de ces gamins. Mais c'est sans doute le traitement de la relation prof / élève qui est le plus irritant: à travers les échanges houleux entre prof et élèves, on s'efforce de nous convaincre que ces gamins ne sont pas des abrutis, et qu'être dans le dialogue avec eux serait toujours la meilleure attitude. Sauf que les auteurs du film n'ont pas saisi le distinguo entre "favoriser le dialogue avec les élèves" et "se justifier auprès d'eux", se mettre en position de "culpabilité" et donc leur donner l'ascendant. Car effectivement, les collégiens ne sont pas des abrutis, et étant de bons petits êtres humains, ils savent eux aussi jouer de manipulation avec leur interlocuteur pour prendre l'ascendant. Mais de cela, le regard des auteurs veut rester complétement aveugle et donc ils se contentent, ils s'obstinent à nous présenter l'insolence et l'indiscipline comme des marques de vivacité intellectuelle face à un monde injuste. Mieux encore : ce sont les élèves qui feraient la morale au prof ( Coumba et sa copie sur "le respect", Esméralda et ses multiples remarques). Bref, le prof est souvent mis en porte à faux, comme s'il était responsable de l'insolence et l'indiscipline des élèves.
Alors, oui, il y a des scènes plaisantes, celles concernant les parents entre autre, mais cependant leur traitement est peu approfondi, cantonné à des vignettes pour remplir le carnet des charges et donner l'impression qu'on a fait le tour de la réalité. D'autres scènes par contre sont irritantes tant elles sont démonstratives dans leurs intentions (globalement toutes celles portant sur le corps enseignant) : le prof de technologie et sa crise de "ras le bol", dont le texte sonne faux et trop cliché dans l'interprétation, les conseils de classe et de discipline ainsi que l'histoire de la chinoise transférée en centre de rétention et qui n'a aucune suite dans le reste du récit.
Bref, un film qui montre ce que l'on savait déjà, et qui déroge pas à un point de vue consensuel.