Encore une réussite pour Kim Ki-Duk! Surtout n'abordez pas «Locataires» comme son chef-d'oeuvre, il s'agit plutôt, tout simplement, de l'un des meilleurs films de son auteur et c'est déjà beaucoup! On retrouve tout ce qui fait le charme de son cinéma, et toujours ces défauts qui en rebutent tant, pourtant ici infimes. C'est peut-être son long métrage le plus proche de l'art de Tsai Ming-Liang : on retrouve ce goût pour les personnages mutiques, pour l'humour absurde et décalé, pour la lenteur du rythme et un aspect contemplatif... Mais la comparaison s'arrête là, car si les films de Tsai Ming-Liang sont caractérisés par une épure stylistique et une absence de scénario quasi-totales, ceux de Kim Ki-Duk sont au contraire gorgés de références, de symboles, d'idées de mise en scène, mais toujours avec une relative retenue. Leur finalité les rend moins riches et surtout moins libres en apparence que ceux de Tsai Ming-Liang, mais leur impact est nettement plus fort et leur pertinence tout autant avérée (sinon plus). Difficile donc de nier le talent du cinéaste coréen sans faire preuve de mauvaise foi... La poésie de ses films est extraordinaire et une fois encore il navigue avec une aisance déconcertante entre rêves et réalité, mais qui plus est jamais gratuitement, puisque ne serait-ce que par la relative complexité de ses personnages (et leur mystère) il évoque nombre de choses, stimulant tout autant l'intellect que le ressenti et l'émotion. Il est question d'amour, d'attention, de marginalité, de la société coréenne, d'art,... et la liste est longue! Par petite touches et avec une grâce incomparable (quelle légèreté!) il nous emmène très loin, il convient juste de s'accrocher au tout début, «Locataires» démarrant timidement (bien que tout à fait honorablement) pour s'achever avec douceur et poésie. De l'affiche aux quelques mots placés à la fin, un long métrage inspiré et d'une beauté envoûtante, à voir sans hésiter! [3/4] http://artetpoiesis.blogspot.fr/