La Haye, sous l'occupation : Alors qu'elle voit sa ferme détruite par une bombe, la juive Rachel Stein finit par rejoindre un groupe de résistants qui la chargera d'infiltrer la Gestapo et de placer un micro dans les locaux SS...
Après plus de deux décennies passées à Hollywood où il aura tout connu, Paul Verhoeven revient dans son pays d'origine où il n'avait plus tourné de film depuis 1983 et "Le Quatrième Homme" pour réaliser "Black Book", rappelant par son sujet "Le Choix du destin". Il braque sa caméra sur cette jeune chanteuse juive qui va d'abord voir la cruauté nazie et de la guerre s'abattre autour d'elle avant d'être impliqué dans la résistance puis au plus près des nazis.
Le hollandais violent montre tout son savoir-faire et livre un drame historique aussi passionnant que bien réalisé. À l'image de son héroïne, il alterne entre le camp des résistants et celui des allemands, sachant bien passer de l'un à l'autre et donnant assez d'importance à chacun. Il dresse le portrait de cette juive qui va voir les événements se succéder et tenter de s'adapter pour d'abord survivre puis tenter de servir ses idéaux, mais sans négliger la galerie de personnages tournants autour d'elle. Il fait preuve de subtilités dans le traitement des deux camps, montrant d'abord le côté humain et la façon dont on est avant tout dirigé par nos sentiments mais surtout il n'est jamais manichéen et l'obscurité se trouve dans les deux camps, que ce soit chez les nazis ou chez les résistants, que ce soit sous l'occupation ou à la libération. Il dresse plusieurs portraits durant cette guerre et montre l'humain dans son hypocrisie, son instinct de survie ou encore ses ambitions et dans les temps troubles de cette période, que la limite entre le bien et le mal, et ce qu'on soit allemand, hollandais, juif, homme, femme ou athée, est parfois bien floue...
En dressant les différents liens entre les personnages, il met en place son drame duquel il fait ressortir toute l'émotion à travers les enjeux et protagonistes. Il met en scène les diverses facettes de l'occupation, l'angoisse sourde et la terreur qui sont constamment présents, ce qu'il retranscrit très bien à l'image des scènes de bals. Il reste d'ailleurs souvent dans l'ambiguïté, rejetant toute morale et facilité. La tension monte peu à peu et ne redescend jamais, contenant son lot de moments forts. Le film est assez élégant, notamment grâce à une très belle et classieuse reconstitution (décors, costumes...) et une photographie adéquate, permettant de bien immerger le spectateur dans le récit. Verhoeven magnifie aussi ses interprètes, notamment la sensuelle Carice van Houten à laquelle on s'attache sans difficulté.
Pour son retour dans son pays d'origine, Verhoeven montre qu'il n'a rien perdu de son talent et met en scène sa vision du monde et de l'humain à travers une fresque dramatique et passionnante sur l'occupation lors de la Seconde Guerre mondiale.