Les Kellerman entreprennent le voyage de M. et Mme Perrichon à New York. Ou comment se créer de vains problèmes sans issue véritable à vouloir quitter son "foyer". Même si Sénèque, déjà, affirmait que "les voyages ne guérissent point l'âme", que Danton refusa de quitter son pays sous prétexte qu'"on n'emporte pas sa patrie à la semelle de ses souliers", il n'en est pas moins vrai et durable qu'on a toujours été tenté d'aller voir chez le voisin si l'herbe y est plus verte. On pense aussi au poète angevin échaudé par son voyage en Italie : "Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux, Que des palais Romains le front audacieux". Ou à la petite bretonne Bécassine que l'on prend pour une gourde et qui n'est qu'une provinciale inadaptée qui fait front. De là à penser que c'est toujours la même histoire, il n'y a qu'un pas. Tous les prétextes sont bons : le voyage de fin d'année ou de fin de carrière, le besoin de changer d'air ou, comme pour M. Kellerman, une belle promotion avec prime à la clef. On passe son temps à rêver d'un ailleurs, plus riche, plus vaste et on se retrouve vieilli, usé, crotté sur le chemin d'un retour espéré depuis le départ. Quelle belle et intelligente tirade que celle de Mme Kellerman (Sandy Dennis) vantant les mérites de l'Ohio ! Juste avant de rentrer au bercail... ou presque. C'est ce qu'on appelle un morceau de bravoure. Tout ça est drôle, certes, mais très réaliste.