Version Longue :
Je n'ai pas eu l'occasion de voir la version cinéma, mais c'est tout de même révoltant de voir ce genre d'oeuvre, très ambitieuse et emmenée par un grand cinéaste, tronquée de plus de deux heures, gâchant ainsi tout son potentiel, souffle et travail de son auteur.
John Woo, dont j'ai eu l'occasion d'admirer son âge d'or dans le cinéma d'Hong-Kong entre la fin des années 1980 et début des années 1990, revient en Asie après une dizaine d'années d'exil au pays de l'Oncle Sam et se voit confier un immense budget par la Chine pour mettre en scène Les 3 Royaumes. Il adapte ici un roman historique chinois, nous faisant vivre la fin de la dynastie Han et la période des Trois Royaumes entre 220 et 265, et il s’intéresse tout particulièrement à la bataille de la Falaise rouge.
Immense production, Les 3 Royaumes parvient à atteindre une grande partie de ses ambitions et John Woo en fait une fresque épique, avec un contexte passionnant et un souffle certain. Il parvient à faire revivre ce mythe de héros chevaleresque, quitte à parfois en oublier l'émotion et l'approfondissement des personnages, sans que ce soit vraiment préjudiciable. Il axe son oeuvre autour de trois grandes batailles, et il sait exploiter les immenses moyens mis à sa disposition, tant dans les décors que les figurants, dont l'armée chinoise.
Sa mise en scène est remarquable, il fait vivre les événements, démontre une vraie science dans la gestion du temps mais surtout de l'espace tandis qu'il se montre incroyablement à l'aise pour filmer différentes sortes de batailles, avec quelques moments virtuoses inoubliables, à l'image des moments maritimes. Autour de ses batailles, il parvient à mettre en place une ambiance romantique, parfois héroïque et bien souvent prenante, avec de nombreuses bonnes idées comme celle du sacrifice du thé.
Si évidemment il ne se détache pas de l'aspect héroïsme chinois parfois un peu excessif, il arrive à habilement créer une histoire forte, avec des protagonistes plutôt intéressants. Il montre aussi un certain savoir-faire pour mettre en place le calme avant la tempête, des moments parfois profondément humains mais aussi hautement stratégique, et il nous y immerge avec grand brio. Devant la caméra, on ne peut que saluer les diverses performances d'acteurs, mention tout de même à Tony Leung Chiu-wai.
Si John Woo propose avec Les 3 Royaumes une oeuvre imparfaite, elle n'en reste pas moins passionnante et épique, avec une immersion totale sur une remarquable reconstitution de champs de bataille, où l'on passe par de nombreux sentiments mais jamais celui de l'ennui durant ces cinq heures.