J'ai eu bizarrement la sensation d'avoir eu un plaisir coupable en regardant La Marche de L'Empereur, un film documentaire qui m'a beaucoup plu et qui paradoxalement me gêne énormément. Ce que j'ai aimé tout particulièrement, c'est la forme du récit original et unique : non, on est loin d'un documentaire sur les ourangs outans de Papouasie nouvelle guinée que diffuse Arte à 16h, mais dans un documentaire qui tutoie beaucoup le cinéma dans sa narration et sa progression. Et ca c'est un vrai plus qui nous accroche à l'oeuvre qui va donc bien plus loin que la simple observation animal : on y trouve aussi bien des éléments scientifiques que fictifs ou dramatiques voir humoristiques. On pourrait dire donc que finalement, si tout les documentaires étaient comme ça, on ne décrocherait plus de France 5. Pourtant cette forme dérange , surtout pour le style narratif : on suit une famille manchot composé de maman manchot, papa manchot et bébé manchot, qui parlent comme de vrais humains (voix de Bohringer, Berling et Sitruk). Le problème vient du fait que La Marche de L'Empereur vire vite à l'anthropomorphisme : on dote les manchots de sentiments, de craintes, d'expressions qui ne sont pas naturelles, ca enlève beaucoup de crédibilité au propos si bien qu'on à l'impression de voir parfois une parodie de Patrick Bouchitey. En fait ca serait passé si on était pas dans l'exagération des propos ou de la mise en scène, comme lorsque la maman manchot a des flash back de l'attaque d'un phoque ou que le bébé manchot s'exclame "maintenant je suis un grand et je dois apprendre à être responsable", parfois cette narration nous exaspère. Malgré tout, celle-ci rempli souvent son rôle à merveille : nous faire comprendre le comportement des manchots et ainsi faire grandir notre intérêt pour eux. De ce côté, il faut vraiment être fermé d'esprit pour ne pas être passionné par ce qu'on nous présente. La progression est parfaite pour suivre cette marche des manchots qui répètent de nombreux rituels et qui se lancent dans une véritable course contre la montre pour donner la vie dans des conditions extrêmes; les images choisis sont tout d'abord de toute beauté, la photo est géniale, tout comme les plans sur les manchots souvent magnifiques, drôles ou tristes, toujours riches en émotions. Le réalisateur est par ailleurs très intelligent de traiter de manière assez cruelle les passages "durs" pour notre condition humaine dans le processus de création de la vie et de mort chez les manchots. Riche en émotions c'est donc là la force de ce documentaire que l'on vie avec stress, suspens, rires et larmes, sans doute parce que Luc Jaquet capture parfaitement la vie de ses manchots qui à plus d'un côté nous rappel nous êtres humains.