Sur ma lancée Claude Sautet, "Vincent, François, Paul et les autres" fait partie du cinéma des 70's ancré dans toutes les mémoires de cinéphiles. Comment parler d'un film choral sur la société sans citer "Vincent, François..." ? Au sujet des problèmes de la quarantaine, comment ne pas évoquer les drames de la vie à travers "Vincent, François..." ? Sur les problèmes sociétaux donc, "Vincent, François..." fait ainsi partie d'une culture cinématographique immanquable et incontournable, car rarement ces amours brisées n'ont été superbement mises en scène.
Film ancré dans la mémoire populaire aussi car, succès au box-office français aidant (2,8 millions de spectateurs en 1974), Claude Sautet pointe du doigt les degrés de liberté de la femme (droit de mariage, de libertinage...) et de la politique post soixante-huitarde en général.
Pour toutes ces qualités, "Vincent, François, Paul et les autres" fait office de référence d'un point de vue scénaristique, et de retrouver pour la troisième fois Claude Néron (après "César..." et "Max..." et Dabadie (présent depuis "Les choses de la vie") aux commandes d'une histoire écrite et chapeauté par Sautet lui-même. Le point d'orgue de "Vincent, François..." qui permet à Claude Sautet de se considérer comme étant le raconteur de la société.
Les compères jouant le médecin désavoué (Piccoli), l'industriel dévastateur cloporte (Montand), l'écrivain-journaliste en manque d'inspiration (Reggiani) et le boxeur à moitié perdu (Depardieu) servent, avec une précision radicale, l'atmosphère du scénario brillamment retranscrite par l'esprit de camaraderie qui anime ce film de bout en bout. Une interprétation générale sans faille jamais dominé par un acteur ou une actrice en particulier au cours du film. L'envie de Sautet de jouer sur la carte du sentimentalisme de la société ? Oui et non. D'un côté, on a les acteurs, tous bons, et de l'autre, l'ambiance générale retranscrite par un Sautet qui s’acoquine de ce quatuor d'acteurs pour nous dépeindre cette société grisée. Un peu à la "Max et les ferrailleurs", Sautet nous embarque dans son œuvre empruntée de réalisme mais sans nous convier forcément à ses repas du dimanche. De ce fait, on oscille sans arrêt entre film d'auteur et film de divertissement. Dommage pour Claude Sautet qui atteint ici les sommets d'un film choral maîtrisé à la perfection.
Pour revenir côté casting, nous sommes en plein divertissement, assurément ! On retrouve Yves Montand (dans sa période Costa Gavras : "Z", "L'aveu", "Etat de siège"...), Michel Piccoli (il a joué pour Ferreri dans "La grande bouffe" l'année précédente), Serge Reggiani (remarqué chez Cayatte ("Les amants de Vérone") et Becker père ("Casque d'or")), Gérard Depardieu (il joue la même année dans "Stavisky" et "Les valseuses" : rien que ça !!), Stéphane Audran (gagnant des galons grâce aux "Cousins", elle deviendra Madame Chabrol à la ville), Catherine Allégret (fille d'Yves et mère d'un présentateur fétiche de la première chaîne française, on l'a vue aux côtés de Johnny dans "L'aventure, c'est l'aventure" parmi tant d'autres), Marie Dubois la "Grande vadrouilleuse", Ludmila Mikaël (alors au début de sa carrière) et Antonella Lualdi (elle est consacrée par Claude Autan-Lara dans "Le rouge et le noir"). Du beau monde en quelque sorte.
Toujours à la barre, Philippe Sarde nous compose des partitions languissantes au possible qui ont l'art d'accompagner nos tristes compagnons de route sur la voie de la vie et d'une possible renaissance.
Pour conclure, ce septième long-métrage de Claude Sautet se délecte d'une façon bien particulière, celui de s'ancrer dans le contexte des 70's, à n'en pas douter !. Je reste juste surpris de ne pas avoir reçu la claque à laquelle je m'attendais de la part du metteur en scène de "César et Rosalie". Indéniablement,un immanquable Sautet.
Spectateurs, à vos Marlboro !