Bug fait parti de ces expériences limites que l’on reçoit comme un coup de poignard dans le ventre, avec l’impression d’avoir aimé ça, au-delà du raisonnable. Alors, Bug, qu’est ce que c’est ? Pour en parler, il faudrait évoquer le théâtre, le stand up, la danse contemporaine ou le body art. Mais Bug est d’abord une histoire d’amour, la plus douloureuse et la plus folle de toutes. Un homme et une femme à la dérive se rencontrent dans un motel crasseux. Autour d’eux, un monde qui s’effondre. Sous leurs peaux, des insectes mutants, grouillant par millions. Une histoire de fous, une histoire d’amour fou.
En adaptant une pièce de théâtre de Tracy Letts, William Friedkin réalise, plus de trente ans après l’Exorciste, un huit clos d’une incroyable modernité. Pas question de laisser la place aux jeunes ! La mise en scène de Friedkin est dynamique, furieuse et le film est en ébullition constante. Trop en dire sur son contenu serait briser le sortilège qui l’anime, car le principal intérêt de Bug, c’est d’être imprévisible d’un bout à l’autre. On s’attend à tout, mais surtout au pire : morts violentes, explosions, tremblements de terre… Les personnages pourraient se transformer en fourmis géantes que ça ne nous étonnerait même pas. La force évidente du film, ce sont ses acteurs, Bug procurant des émotions que seul le théâtre d’ordinaire procure. Ashley Judd, d’abord. Elle est démente dans le personnage d’Agnes. Ce n’est pas une performance d’actrice, c’est un buisson ardent. D’abord émouvante et drôle avec sa dégaine de bécassine, elle se métamorphose peu à peu en créature inquiète et dangereuse, une guêpe probablement. Elle hurle, crache, pleure, vomit sa détresse à la gueule du spectateur avant de finir en apothéose dans une scène improvisé