Véritable pamphlet onirique sur la petite bourgeoisie puritaine américaine, Palindromes nous ouvre les portes d'un monde équivoque, acide, rêveur, largement provocateur. Effectivement, Todd Solondz dessine son héroïne sur un antipode à la fois intellectuel et physique. La première se définie dans la manière de concevoir sa vie d'adolescente. Toutes les deux sont bouleversés par leurs circonstances. L'une pèche par la volonté d'avoir un enfant alors qu'elle n'a que douze ans, la seconde ayant au contraire décider d'extirper son passé de prostitué en s'installant dans une pratique catholique dans une famille du bon Dieu. En outre, le réalisateur n'hésite pas à filmer avec cynisme une scène où la pauvre Aviva se fait violer par un routier obèse peu scrupuleux. Dérangeante et alerte, elle devient source de méditation sur son titre propre, à savoir le palindrome au sens où on l'entend. En effet, est-il nécessaire de croire que la vertu absolue, telle qu'on nous la représente avec cette famille traditionaliste, ne soit le voile d'une illusion qui consiste à refuser ce que notre propre nature ne peut déraciner ? C'est-à-dire le vice, tout simplement. Le palindrome est une fatalité. Mais là où le film devient très jouissant, c'est dans sa tentation de se moquer avec aigreur des corruptions d'une conception religieuse apparente. Les deux héroïnes sont la cible d'un système où elle se perdent, commettent le beau et le laid dans une double vie fusionnée par une ressemblance : leurs perditions. En outre, il y a dans ces deux peintures une différence physique fortement ironique. En effet, celle qui fugue et fait un enfant tout en étant violée par la suite est d'une couleur de peau blanche, alors que celle qui se nourrie de bonnes pratiques de bonne famille est d'origine ethnique noire. Cette insolence est d'autant plus efficace qu'elle est intelligente. En conclusion, la réalisation de Todd Solondz est étonnante, détonnant pour sa critique des moeurs jubilatoire.