C'est une histoire terriblement simple, mais Chris Kentis, dont c'est le deuxième long métrage, réussit un film authentiquement glaçant. Des requins, il y en a. A vous passer définitivement l'envie de tremper un orteil dans l'océan. Le film de Kentis, contrairement à celui de Spielberg, ne procure pas de grands et réjouissants frissons. Pas de gueule béante pour rire, pas d'effet grand huit. Open Water nous plonge dans des eaux plus troubles, et ses héros expérimentent toutes les étapes de l'angoisse : en vrac, l'incrédulité quelqu'un finira bien par venir les chercher... ? , l'affolement, l'instinct de survie, diverses phobies... Kentis et sa femme, Laura Lau, chef opérateur, filment au ras de l'horizon, produisant un terrible effet de réalité, mais aussi d'enfermement. D'abord les méduses, puis le froid, la soif, la nausée... Le couple dérive, somnole, s'engueule, s'affole, et finit, avec nous, par se demander si cette mésaventure aura une fin. Alors vient la terreur, et, avec le crépuscule, les requins, silhouettes fugaces, frôleuses, insistantes... Plus rien, dans ces ténèbres verticales, n'est balisé, familier. On pourrait être en haute montagne ou tout autre lieu « sauvage » : là, les choses ne se laissent plus que superficiellement apprivoiser par l'oeil et le langage humains. Ce n'est plus la mer elle-même qui effraie, ni les requins, c'est la présence d'un « innommable », infiniment étranger et dangereux. Mais ce thriller aux confins de l'angoisse est aussi un formidable huis clos psychologique, interprété par deux inconnus talentueux, Blanchard Ryan et Daniel Travis. Une belle séance d'apnée.