Se consacrant presque exclusivement au théâtre, l'acteur n'était pas reparu à l'écran depuis 2005, c'est-à-dire sa performance en Promeneur du champ de Mars, alias François Mitterrand.
Les réalisatrices Stéphanie Chuat et Véronique Reymond tournent avec La Petite Chambre leur premier long métrage. Comédiennes de formation, elles ont monté une dizaine de spectacles dont le plus récent, créé en avril 2010, est l’adaptation à la scène de "Lignes de faille" de Nancy Huston. Au cinéma, elles ont coécrit et réalisé cinq court métrages et deux documentaires.
Les réalisatrices Stéphanie Chuat et Véronique Reymond racontent l'arrivée de Michel Bouquet au casting : "Pendant l’écriture du scénario, nous étions inspirées par de vraies personnes âgées de notre entourage, amis, grand-mères ou voisins... Au moment du casting, notre désir s’est très vite porté sur Michel Bouquet. Son charisme mêlé de charme et de violence convient à la perfection au personnage du film. Nous étions pratiquement sûres qu’il refuserait notre proposition car il refuse tous les rôles de cinéma qu’on lui propose, préférant désormais se consacrer au théâtre. Cependant, à notre grande surprise, il s’est senti « accroché » par notre scénario et il a accepté de participer à cette aventure".
Une fois le premier rôle masculin distribué, restait à choisir les autres membres du casting, que les réalisatrices ont mis plus de temps à définir : "Florence Loiret Caille nous a été présentée par notre directrice de casting française. Dès notre première rencontre avec cette actrice hors pair, l’évidence s’est imposée à nous. De nature intègre, Florence Loiret Caille a fait montre d’un talent rare, elle a su incarner de façon lumineuse ce rôle complexe de femme en plein chamboulement existentiel. Quant à Eric Caravaca, il est le seul acteur auquel nous pensions lors de l’écriture du scénario. Sa sensibilité, sa sincérité et sa forte présence à l’écran nous ont beaucoup inspirées pour le personnage de Marc. Ainsi, nous avons été enchantées lorsqu’il a accepté de participer au film.".
Avec La Petite Chambre, Florence Loiret-Caille et Eric Caravaca jouent pour la troisième fois dans un même film. Ils ont travaillé ensemble dans Cette femme-là (2003) de Guillaume Nicloux, puis dans J'attends quelqu'un de Jérôme Bonnell.
Les réalisatrices évoquent la thématique du film, une réflexion sur la vieillesse, en lien avec la société actuelle : "Il nous semble important de parler de la société vieillissante de notre pays, du rapport que nous entretenons avec le quatrième âge et la perspective peu attrayante de finir nos jours en maison de retraite, antichambre de la mort. A l’étranger, on compare la Suisse à une vaste maison de retraite. D’où cette envie de développer la question : que fait-on de nos vieux ? Et que ferons-nous de nous-mêmes lorsque nous atteindrons un âge avancé ? Nous traversons la vie à toute allure, jusqu’au jour où nous perdons notre indépendance physique. Dès lors, on devient un boulet pour la société, on ne sert plus à rien et on coûte cher en matière de frais médicaux. Aujourd’hui, l’âge ingrat ne se réfère plus à l’adolescence mais au quatrième âge !"
Les réalisatrices reviennent sur leur rapport avec leur comédien principal durant La Petite Chambre : "Le travail s’est déroulé de manière très simple. Michel Bouquet a aimé le scénario et nous a fait confiance dès le départ. C’est un acteur totalement habité et dévoué à son art. Durant le tournage, il était en travail constant sur son rôle, et il se l’est approprié de façon tellement puissante qu’il devenait chaque jour davantage « Edmond », son personnage dans le film (...). De son côté, il ne s’est jamais inquiété du fait que nous soyons deux à réaliser le film, il accueillait chacune de nos interventions avec sérieux, sans jamais nous faire sentir que nous étions « jeunes » en matière de cinéma. Un grand cadeau".
Stéphanie Chuat et Véronique Reymond confient leur méthode de travail à deux : "Florence Loiret Caille nous surnomme « l’aigle à deux têtes », ce qui nous amuse. D’autres ont utilisé l’image du bimoteur.... De notre côté, comme nous nous connaissons depuis l’enfance, nous avons « grandi ensemble » et n’avons jamais verbalisé notre rapport de travail, car il s’est construit de manière intuitive et empirique, au travers de nos diverses activités artistiques. Nous écrivons à quatre mains et travaillons de la même manière sur le plateau, aussi bien avec les acteurs qu’avec l’équipe technique. Si l’une s’adresse au chef opérateur, l’autre ira plutôt parler aux acteurs, et vice-versa, en fonction des scènes à tourner."
La technique de direction d'acteur était simple pour les réalisatrices : "On ne lâche pas prise tant qu’on n’est pas satisfaites. La contrainte est un excellent moteur qui, paradoxalement, libère la créativité. La réussite d’une scène est due à l’interaction des personnages, au lien qui se tisse entre eux. Le jeu n’existe qu’à travers la relation à l’autre, même non verbale. Pour notre plus grand bonheur, Michel Bouquet et Florence Loiret Caille se sont vraiment rencontrés sur le plateau de La Petite Chambre."