Le film est une ligne qui tend vers sa fin, un petit pas d'enfant après l'autre. Fin annoncée dès la première image. Ahurissante métaphore du secret dont Akira et sa fratrie portent le poids écrasant, sans jamais en abdiquer la responsabilité, condensé de l'année à venir, avec la même économie d'expression et la pudeur qui sont la marque de fabrique de la réalisation.
Cette valise, c'est " nobody knows " - nobody knows et pourtant tout le monde voit.
Le film a été tourné complètement dans l'ordre chronologique, sur quatre saisons, avec des modifications physiques subtiles, mais perceptibles des personnages. Le passage du temps qui est le ressort dramatique de l'histoire se fait ainsi profondément sentir à la fois dans sa quotidienneté et dans son implacabilité, deux dramaturgies apparemment paradoxales que l'auteur parvient génialement à unir. La façon dont nous ressentons l'attente incommensurable des enfants, leur trajet inexorable mais quasi imperceptible - car sans à coup - vers le mur, sont indissociables de ces choix de narration. Nous faisons leur expérience.
La puissance de la démonstration est soutenue par la grande rareté des paroles. L'auteur nous empêche d'élaborer, de rationaliser, de généraliser : nous avons, comme les enfants, à subir, à encaisser, en silence. La tension linéaire est sans faille, dynamique propre à la tragédie, mais là où elle pénètre plus profondément que dans les ressorts tragiques habituels (où on sent voù on sent venir la fin et on se blinde), c'est que la lenteur du rythme nous conduit à patienter, à lâcher prise - comme les enfants encore.
C'est le vrai tragique de la vie, sans grandiloquence, dans la discrétion, et c'est d'autant plus déchirant