"Whisky" est un film sympathique. 2nd long métrage de 2 jeunes réalisateurs uruguayens, le film, construit à partir d’une formule classique et déjà éculée, parvient malgré tout à fonctionner, et à nous décrocher à plusieurs reprises un sourire sincère. Le mérite en revient au travail sérieux des deux cinéastes, qui maîtrisent parfaitement leur scénario, à la rigueur stylistique qu’ils s’imposent, et à laquelle ils se tiennent, et à une certaine délicatesse, qui fait qu’ils n’en disent jamais trop. Les non-dits tiennent en effet une place essentielle dans la dimension humoristique du film. Donc "Whisky" est drôle. Certes. Mais de cet humour particulier qui se nourrit des grands drames sociaux, ou plutôt du ridicule des situations qu’ils peuvent engendrer. Car je pourrai très bien comprendre quelqu’un pour qui "Whisky" serait un film terriblement déprimant. Car c’est bien de solitude dont il est question, chacun des 3 personnages incarnant sa solitude spécifique, dont les tenants et aboutissants la rendent incompatibles avec celles des autres, engendrant des situations grotesques et absurdes. Si le personnage de Jacobo est trop campé dans son rôle sans vie, empêchant toute forme d’empathie, son mutisme sert de contrepoids à la subtile transformation intérieure de Marta, qui évolue progressivement de l’ouvrière asexuée, abrutie par une existence réglée comme une machine, à une femme retrouvant désir, espoir et goût de liberté. Là est la réussite du film: parvenir à nous faire ressentir ce qui se passe dans cette femme, sans qu’il n’y soit fait une seule fois allusion. Certains reprocheront au film de garder un peu trop le mystère, dans sa dernière partie. C’est à mon sens un choix au contraire logique et inévitable afin de maintenir la douce émotion que diffuse le film. Alors oui, "Whisky" ne laissera pas une trace indélébile dans votre mémoire, d’autant qu’il n’apporte rien de plus que ce que fait déjà Kaurismaki par exemple. Mais bon, ca se regarde sans déplaisir.