Onze ans après L'Etrange Noël de M. Jack dont il avait imaginé le scénario, Tim Burton retourne à l'animation et s'attelle cette fois à la réalisation pour un long-métrage à son image, s'inspirant du conte traditionnel russe La Mariée morte. Pour l'occasion, le cinéaste va avoir recours une nouvelle fois au "stop-motion", consistant à photographier image par image des marionnettes dans des décors rigides. Une technique qui représente un travail titanesque, nécessitant beaucoup de patience et de minutie, mais qui offre une qualité d'animation singulière et un charme qu'aucun ordinateur ne saurait retransmettre. Avec Les Noces Funèbres, Tim Burton accorde une critique grinçante à la société bourgeoise, qu'il présente ici comme hypocrite, opportuniste et hautaine. Le monde des vivants apparaît ainsi comme bien peu réjouissant, à l'ambiance terne, froide et triste. De plus, hormis Victor et Victoria, les vivants ont tous ici un physique disgracieux et repoussant, inspirant beaucoup d'antipathie. A contrario, le monde des morts se trouve être nettement plus festif, coloré et joyeux, où chacun profite et s'éclate, puisque enfin débarrassé de toutes les contraintes et les responsabilités qu'implique la vie. Un long-métrage à la fois effrayant et jovial, où morts et vivants se côtoient, contournant ainsi toutes les lois logiques de la nature. On éprouve vite de la sympathie pour Victor, un garçon maladroit et bienveillant, épris de sa jolie promise Victoria, malgré des beaux parents détestables au possible. Mais dommage pour le bonhomme, il va se retrouver accidentellement marié à Emily, qui se trouve être... morte. Notre affection va alors peu à peu se tourner vers cette défunte mariée, car malgré une certaine tendance à la jalousie et à la possessivité, on ne reconnaît en elle que l'espoir ultime de trouver enfin le bonheur, un bonheur qui lui a été brutalement arraché auparavant. Une décision cruciale va alors s'imposer à Victor, celle de choisir entre le monde plaisant et (étrangement) vivifiant des morts, et celui des vivants bien moins exaltant, mais où il pourra retrouver celle qu'il aime. Finalement, la mort est peut-être la clef qui ouvre les portes à la vie véritable, mais est-il utile de vivre sans amour ? Bon ok, stop le délire pseudo-phylosophique. Gothique, lyrique, romanesque, irréel, romantique et poétique, on retrouve tous les ingrédients chers au cinéma de Burton, le tout agrémenté d'un humour noir. Le réalisateur s'entoure d'ailleurs de ses habituels collaborateurs, notamment de Johnny Depp et d'Helena Bonham Carter, qui prêtent respectivement leurs voix à Victor et à la mariée cadavérique. Danny Elfman signe sans surprise la B.O du long-métrage, tout comme la majorité des films réalisés par Tim Burton. Mais si le résultat est tout à fait satisfaisant, il faut admettre qu'on est quand même loin du travail fantastique effectué pour la bande originale de L'Étrange Noël de Mr Jack. Même si ma préférence va à ce dernier, Les Noces Funèbres est une œuvre aboutie à l'esthétisme parfait, drôle, tendre et surprenante. Tim Burton nous ouvre les portes d'un univers singulier, où la quête de l'amour croise le chemin de la rédemption.