La condanna est peut être le premier film sans refuges du cinéaste des corps hurlants, les films de Bellochio suivront comme de belles cachettes, de belles commodes pour douter, se réfugier dans les seins, les sourires ou le visage de Giovanna Mezzogiorno, dans son dédales de moments "à la gloire de la femme" du peuple. La Condanna revient donc comme un coup de canon, d'une froide haine contre la duplicité bourgeoise, comme je l'ai compris, le plat stendhalien se répand sur la robe d'une justice qui s'exerce dans la crispation du doute. Un viol, un procés, un procureur, l'équation est théorique, l'art de Bellochio est de glisser de scénes lourdes en scènes lourdes (un viol dans un palatio calabrais, des scènes fantômes du Diable Au Corps, le procés où l'accusé devient la victime de la dévotion, un procureur en proie à un doute La Rochellien) sans perdre l'objet qu'il cherche à fixer en moraliste de l'envers. Le devoir de la femme chrétienne vu par les moralistes espagnoles, les devoirs conjuguaux vu par Erasme, se retrouve happés par la beauté non retenue des espaces du film. La réflexion devient alors double. L'aspect irréel du film et sa vision subjective renvoie à l'impossible du spectateur, de prendre part d'après l'observation des faits, à un quelconque dénouement. On parvient à saisir la terrible forteresse tragique que chaque femme, bourgeoise ou pauvre à comme devoir d'édifier autour d'elle. Pour ne pas devenir l'objet, du désir, de la maternité, d'un moindre degré de liberté.