En 1907, le ministre de l'Intérieur, Georges Clémenceau surnommé "le Tigre" crée les premières brigades mobiles de la police. En 1912, le commissaire Valentin et ses adjoints Pujol et Terrasson traquent les anarchistes de la Bande à Bonnot. Ils tombent sur la piste d'un mystérieux carnet codé, propriété d'un banquier (forcément verreux) et enjeu d'un combat sauvage entre anarchistes, police secrète tsariste, princesse russe au double jeu, et tout ça sur fond de guerre des polices (déjà !).
Difficile de résumer l'intrigue, tellement elle est alambiquée, absolument pas crédible, et pour tout dire, résolument inintéressante. Une question s'impose très vite : pourquoi un tel film ? Pour surfer sur la nostalgie des baby-boomers (dans la suite de "Vidocq", "Blueberry" et en attendant "OSS 117") ? Pour concurrencer les Américains sur le filon de l'adaptation des séries télés ("Mission Impossible", "Drôles de Dames", "Ma Sorcière bien aimée") ? Il suffit de lire cette liste pour se rendre compte qu'il s'agit d'ailleurs d'une bien belle brochette de nanars, sauf quand un vrai réalisateur se met derrière la caméra (Brian De Palma ou John Woo, par exemple).
Or là, pas de vrai réalisateur, ni de scénariste d'ailleurs. L'histoire aligne les clichés, et les personnages sont tous conventionnels et prévisibles : le commissaire amoureux de l'espionne, le préfet fourbe et cruel, l'anarchiste au grand coeur, le terroriste russe impitoyable... On a l'impression que le scénariste a repris son livre d'histoire de l'école primaire, et qu'il a cherché à placer toutes les figures pittoresques de cette (belle) époque : Bonnot, Poincaré, l'emprunt russe, la Triple Entente ; et que dire du rôle ridicule accordé à Jean Jaurés, allié aux anarchistes... N'est pas Billy Wilder qui veut, qui avait fait se rencontrer le locataire du 221b, Baker Street et la reine Victoria dans "La Vie privée de Sherlock Holmes" !
Même si elle s'ancrait dans les événements de l'époque (déjà la bande à Bonnot), la série télévisée de la fin de l'ORTF (1974) avait pour principal intérêt de montrer les débuts de la police moderne : portrait-robot, relevé d'empreintes, photo anthropométrique, utilisation de la voiture et du téléphone... La version 2006 ne s'intéresse à cet aspect que pendant les trois minutes du générique, et il ne reste de l'original que la musique de Claude Bolling et les Panhard-Levassor (et encore, je crois que dans la série, ils étaient équipés de Renault...)
Ici, le réalisateur (ou les producteurs ?) ont voulu faire un film à l'américaine, avec cascades (en De Dion Bouton, ça pulse !), explosions et chassepots transformés en shot-gun. Sous prétexte d'imprimer un rythme qui tente de faire passer la pilule de la durée (plus de deux heures !), on passe du coq à l'âne, tant en ce qui concerne l'action, que la tonalité : mais ça sonne aussi faux dans le tragique que dans le "comique". Les acteurs ne sont pas dirigés, et si Clovis Cornillac s'en sort plutôt pas mal, Edouard Baer ne fait que de l'Edouard Baer, et Olivier Gourmet semble bien perdu loin des frères Dardenne... Et dommage de réduire des acteurs comme Thierry Frémont et Jacques Gamblin à des personnages aussi caricaturaux.
Bref, un film à oublier. Pour moi, c'est déjà fait.
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