Toujours libre, indépendant et créatif, malgré son association avec le géant Disney Studio, Pixar démontre toujours qu’une double lecture pour petits et grands est de rigueur. John Lasseter le comprend très bien et cache son jeu derrière ces animations qui peuvent donner un corps enfantin à ses œuvres, alors que la vérité est toute autre. L’individualisme est de nouveau à l’étude. Comme pour « Toy Story » ou encore « 1001 Pattes », le réalisateur semble vouloir insister davantage sur un éveil nécessaire sur la condition de vie Américaine. Et cette fois-ci la débauche de la vitesse et de l’hyperconsommation est bien plus prononcée.
C’est avec Flash McQueen, figure qui prône sur le circuit et dans l’image que l’on tient d’une jeunesse en quête de maturité, que l’on découvre les vestiges d’une culture perdue. Confronté à sa propre personne, il fait face à l’abandon de tous, avant celui de soi. Son moteur gronde la rébellion, mais son cœur dérape vers l’émotion. On a beau tiré les mêmes morales, identiques à toute fable de jeunesse, mais ce parcours initiatique ne fait que tromper l’œil. De même pour la course, car en soi, le personnage sera amené à s’améliorer. Ce qui intéresse, c’est le décor de Radiator Springs. On y découvre l’envers du décor que l’urbanisation recale au rang touristique, si l’on veut bien prendre un peu de son temps pour faire le détour.
Si l’on a pris la peine d’insuffler la vie chez ces véhicules, souvent limités à une fonction particulière ou métier, c’est qu’il y a de la grandeur à l’intérieur. Pas de rouille, que du neuf. Sally Hunt fait office de cette femme à la fois fragile, mais surtout amoureuse. De qui, de quoi ? Pas immédiatement du héros, mais du paysage naturel où le silence interpelle la sagesse et le respect. Cette valeur est la plus touchante du récit, qui ne se contente pas de défendre une cause écologique mais on y appréhende également du bon sens. La nostalgie est ce qui est dépeint autour de cet univers. L’apparition de Martin, le dépanneur qui se tourne à l’autodérision, rafraichie l’atmosphère mais permet aussi de profiter de ce goût de liberté que l’on doit encore aller chasser à l’intérieur de nous. McQueen la trouvera en cette ville d’accueil, qui introduise des personnalités épanouies, souvent mis à l’écart. Cela reflète ces petits commerces qui ont du savoir-vivre que l’on estime disparaitre peu à peu aux alentours de nos quotidiens, trop mécanisés.
« Cars » reste limité à la vision d’un continent surexploitant sa bêtise du luxe et de la vitesse. Ce qui aura toutefois le mérite d’appuyer la caricature égocentrique de Flash McQueen, tenant les rênes et son moteur en alerte tout le long du voyage. En cherchant un peu dans ce canyon que borde la route 66, on y découvre un visage sociétal en perdition. Il serait donc temps d’accepter le recul que nous propose le film, sans oublier que l’aventure se veut plus humaine et que l’humour n’est pas toujours utilisé pour combler l’œil, avide de divertissement.