Avant d'exposer notre argumentation sur le film de Iciar Bollain, il est nécessaire de réfléchir sur l'origine et la naissance d'une telle production. En effet, l'Espagne est le pays européen qui connaît le plus de violences conjugales, même si ses voisins ne sont pas pour autant des modèles. Cette réalité aberrante qui existe dans toutes les civilisations, et certainement depuis la naissance de l'Homme, démontre que la complexité des rapports entre les deux sexes est la première préoccupation de ce message qui se veut alerte. Tout d'abord, il s'adresse, universellement, à toutes et à tous. Sa fonction a pour principe de nous heurter face à des comportements jugés dangereux, choquants, où l'homme maltraitant la femme, inconsciemment, dégage une brutalité physique et morale qui lui est néfaste autant pour lui que pour elle. Le mérite de Te doy mis ojos, de titre original, est la maîtrise d'une psychologie très réaliste. Par exemple, le couple habité par les comédiens Laia Marull et Luis Tosar, formidables tout deux, plaque la situation telle qu'elle : il aime sa femme, la bat par jalousie; inconscient du mal qu'il lui donne, elle hésite parfois à le quitter mais ne peut s'empêcher de revenir par amour pour son mari et pour son fils; enfin, parce que la société, le poids de la famille et de la religion le lui impose indirectement. La réalisatrice a pour rôle de nous éduquer à ne pas faire ce que l'on voit à l'écran. De ce point de vue, la démonstration peut se comparer à un message de prévention comme on en voit en France sur la violence dans le couple à la télévision. Par conséquent, peut-on véritablement parler d'une oeuvre artistique ou d'un message collectif déguisé en projet cinématographique ? On dirait un téléfilm, malgré la qualité de l'interprétation, et l'analyse n'a rien d'édifiant. Le tabou n'a rien d'absolu. Il y a aussi d'autres points noirs, comme des poncifs sur l'art assez désagréables sur la question de la sensibilité. Mais la combat est salutaire.