Sanglant sans verser dans le gore, dramatique sans tomber dans les larmes "aux petits violons", Hotel Rwanda est un chef-d'oeuvre tant historique qu'émouvant. Inspiré du tristement célèbre massacre du siècle dernier, Hotel Rwanda arrive à toucher le spectateur sans pour autant ne montrer que des scènes de massacre rébarbatives comme on pourrait s'y attendre. En fait, le film démarre presque dans la joie, où l'on voit notre héros, joué par un Don Cheadle au sommet de son talent, profiter des bonnes affaires que lui apporte son hôtel de luxe. Puis viennent les menaces, et enfin l'annonce de l'assaut des Hutus à la radio: notre héros doit donc faire un choix crucial en très peu de temps. Il finit par aider les centaines de Tutsis venus chercher refuge dans son hôtel, en profitant de son statut de Hutu pour éviter les problèmes avec la milice... du moins au début. Petit à petit, on sent qu'il donne plus qu'il n'en a, et pourtant jamais il n'abandonne, continuant sans cesse d'apporter confort, nourriture et logement à tous les réfugiés des guérillas. Mais derrière le côté humainement dramatique du scénario se cache une toute autre ambition: le spectateur est certes choqué par l'attitude des Hutus, mais les véritables accusés de Hotel Rwanda sont les autres puissances. Car tout au long du film, seul l'ONU leur viendra en aide avec une puissance réduite (les soldats ont l'interdiction de tirer), et avec seulement 400 soldats pour tout le pays. L'une des scènes les plus honteuses reste bien sûr l'évacuation des touristes occidentaux, devant les regards désespérés des centaines de Rwandais abandonnés à la mort. Au final, on réalise que le monde entier est coupable d'avoir été simple spectateur, et c'est le véritable message que veut faire passer Hotel Rwanda. Avec des acteurs talentueux (Joaquin Phoenix, malgré son rôle peu mis en valeur, est réellement convainquant, et Jean Reno fait son apparition dans un personnage qui lui colle à merveille), une bande originale qui tient la route et une mise en scène magistrale, Hotel Rwanda mérite largement le titre de référence. Seules quelques longueurs sont à déplorer, et face à un Lord of War on en sort moins marqué. Mais il faut tout de même rappeler qu'il s'agit là d'une histoire vraie, et c'est peut-être ce qu'il y a de triste chez Hotel Rwanda à l'inverse d'un film conventionnel: on aimerait ne pas y croire, malheureusement tout est vrai.