Face aux avis dithyrambiques sur ce film et aux commentaires élogieux du podcast supercinebattle que j'écoute en ce moment, je me lance dans le visionnage de la pépite. Pas de bol, je ne la trouve qu'en version française, avec un doublage peu convaincant qui va me gêner tout le long du film. Mais je regarde jusqu'au bout.
Mon avis certainement biaisé par ces voix françaises qui ne rendent pas service au film est assez mitigé. L'enquête en tant que telle est classique, des meurtres en série qui touchent de jeunes filles, pas de suspects, pas de traces, pas de mobile clair. Dans la difficulté, la police locale, incompétente, va chercher un détective plus fiable à la capitale. Il va donc former un duo avec le commissaire du cru, les deux ayant une approche, une philosophie et des méthodes en tous points opposés.
Sur ce pitch, le film développe plusieurs singularités. Et il le fait à fond ! Il y a d'abord le contexte, coréen, dans un cadre historique particulier puisqu'en pleines tensions politiques et sociales sur la démocratie naissante. Ce cadre est parfaitement mis en valeur dans quelques rares scènes, mais bien conçues, donnant de la profondeur au récit.
Il y a aussi le développement de la campagne contre la ville. Les gens intelligents qui se prennent au sérieux contre les nigauds bouseux qui voudraient se faciliter la vie. Au final, les deux échouent. Morale. Ok, sujet intéressant en soi, mais que je trouve traité de façon trop caricaturale. Falsification de preuves d'un côté, chercher un sens à des allégations totalement foireuses de l'autre... ça ne fonctionne pas vraiment.
Il y a enfin cette fin surprenante que je vous laisse découvrir et qui a remonté le crédit que j'accordais au film jusque là.
Mais il y a aussi ce truc qui me perturbe souvent dans les films de Bong-Joon Ho, ce mélange des genres qui me fait sortir de l'histoire. Car, il insère dans ce cadre d'histoire hyper-sérieux flirtant avec l'horreur un humour burlesque, à coups de blagues potaches, de personnages complètement surréalistes de bêtise et de high kicks en plein interrogatoire. Je comprends que beaucoup apprécient cette façon originale de donner de l'air à l'histoire, mais ça ne prend pas sur moi. J'apprécie des thrillers comme seven ou le silence des agneaux par leur capacité à me mettre la tête sous terre et à l'enfoncer de plus en plus loin. Une fois que le film m'a attrapé, je suis sous tension et je m'intègre dans l'histoire à la recherche des indices sur le tueur, vivant à plein les relations entre les personnages en espérant sadiquement que d'autres moments glauques vont parvenir à m'enterrer davantage. Ce sentiment de tension mêlant curiosité et malaise fait le sel du genre. C'est lui qui me raccroche aux histoires qu'on me raconte et qui me permet de les apprécier. Je n'ai pas trouvé ça dans Memories of Murder, qui s'amuse à tirer mes sentiments dans tous les sens jusqu'à me perdre. C'est le gros point faible du film pour moi, qui suis peut-être trop "conservateur" pour ça.
Mais ça n'enlève en rien le savoir-faire évident de Bong-Joon Ho, tant au niveau des images, du montage que de la photographie claire obscure magnifique.
Bref, film bizarre, surprenant, attachant et dérangeant, difficile à juger et donc noté sur le ressenti du plaisir pris en le voyant, pas mal donc...