Incontestablement l'un des meilleurs de Catherine Deneuve, Belle de jour est une plongée fantastique dans les méandres de l'interdit social, entre fantasmes et réalités. Luis Buñuel réalise un film en sorte de balance fragile, penchant d'un côté, partant de l'autre. L'ambivalence s'attache à une personne qui n'est autre que le personnage captivant de belle de jour, nom de prostitué incarnée par la magnifique Deneuve. Et pour parler de cette femme coupée en deux, on ne peut s'empêcher de pensée à une certaine résonance baudelairienne. En effet, une opposition se trace. Celle du corps et de l'esprit. D'un côté, belle de jour est la femme pervertie par ses fantasmes qu'elle ne se contente plus d'explorer de son esprit, mais souhaite avec difficulté l'exercer physiquement pour lui donner réalité. C'est une image fataliste, une autre image de l'amour. L'aspect du désir physique. De l'autre, Catherine Deneuve est la bonne bourgeoise coincée et froide, ne trouvant plus en son mari l'amour physique qu'elle se procure avec ses clients. Elle y trouve avec ce qu'elle considère de le plus beau au monde, son époux, le sommet même de ce qu'elle trouve être de l'amour sincère, pur, idéalisé: l'harmonisation de l'âme entre deux personnes. Dès lors et sans prendre partie, le réalisateur déssine l'impossible. Entre fantasmes sadomasochismes et l'envie de garder l'amour de sa vie avec une grande pudeur, l'héroïne s'enfonce dans une position délicate, se prostitue, regrette, mais continue. Et au delà l'image de cette femme incontrôlable de ses pulsions, se cache l'idée même d'un symbole universel : l'ambïguité de l'être humain. Tout ne s'explique pas, mais il peut se comprendre. Ou du moins l'entendre. stylistiquement, le film est très soigné, la photographie est remarquable. Mais les prestations sont avant toute chose le grand atout du film. Tout est équivoque, soit suggéré avec grande finesse, soit explicité esthétiquement sur l'écran de plein fouet. Pour un grand moment de cinéma.