Un homicide parmi les plus célèbres de l’histoire de la police telle qu’on la connaît mis en image par le brillant metteur en scène, Brian De Palma, cela avait tout pour plaire. Si le film n’est pas au goût d’un très large public, cela s’explique simplement par le difficulté du sujet, insolvable, mais aussi et surtout parce que le Dahlia noir, au cinéma, c’est la réadaptation d’un récit de James Ellroy, écrivain torturé capable du meilleur absolu comme du plus maussade, tout en gardant en tête sa psychologie chaotique mettant en avant le vice de la Cité des anges d’avantage que ses beautés, quasi inexistantes à l’esprit de l’écrivain. Un cinéaste tel que De Palma était en mesure de filmer un récit d’Ellroy, le Dahlia noir n’étant toutefois pas celui qui s’imposerait comme le plus judicieux des choix.
Oui, pour les lecteurs d’Ellroy, le film ne les dépaysera pas. L’on dissèque ici d’avantage les personnages que le récit, le Dahlia, Elizabeth Short, de son petit nom, ne viendra qu’apporter une substance morbide à une œuvre délicate et parfois difficilement accessible. Oui, De Palma ayant souhaité coller au plus près aux inspirations d’Ellroy, le réalisateur se met à dos un bon nombre de cinéphiles, ce qui est assez paradoxale du fait d’un quasi massacre des romans à succès de passage sur les écrans. Ici, De Palma y est fidèle et peut s’en mordre les doigts. Pour en revenir au film en lui-même, la noirceur du lieu, des personnages, du mythe, tout ça oriente le téléspectateur dans une spirale douloureuse et parfois bien trop floue pour satisfaire la curiosité.
De manière surprenante, c’est vers Josh Hartnett que De Palma se tourne pour lui attribuer son premier rôle d’envergure. Oui, si l’acteur, au sortir d’un certain Pearl Harbor, délivre là une prestation honorable, difficile à croire que ce dernier est l’incarnation même de ce que De Palma souhaitait pour son personnage. Bref, Hartnett, aussi bon soit-il, est accompagné d’un Aaron Eckhart pas dans ses plus bons jours et d’un tandem sexy composé de Scarlett Johansson, excellente, et Hilary Swank, nettement moins. Le casting à l’apparence d’un casting solide, mais semble pourtant ne pas l’être concrètement. L’on était en droit d’attendre plus de la part du cinéaste de ce côté-là.
Le Dahlia noir est donc une semi-déception, du fait d’un réalisateur nous ayant habitué à mieux mais aussi par un traitement qui convient d’avantage à la bibliographie de James Ellroy qu’au septième art. N’empêche, le film tire profit du mythe funèbre du Dahlia Noir, cadavre durement mutilé d’une jeune femme flamboyante et mystérieuse, un mythe macabre mais curieux, ayant rendu les cops de l’époque dubitatif, furieux puis impuissant. La transposition parfaite d’une œuvre de James Ellroy à l’écran, alors que cela n’était pas judicieux. Dommage. 09/20