Que dire de plus que ce qui a déjà été dit à travers les 480 critiques postées par les internautes ? Que Nikita est un des films de l’âge d’or de Luc Besson ? Eh bien oui. Le cinéaste majeur du cinéma français des années 90 est une fois de plus au top de sa forme, seulement deux ans après l’immense succès commercial remporté par "Le grand bleu". Tout comme lors de son précédent film, il met en images son propre scénario, et le résultat final entre en concurrence directe avec les meilleures productions hollywoodiennes. Sauf qu’ici, il ne propose pas un héros, mais une héroïne : une femme, à qui la déchéance était promise, aspirée qu’elle était par une spirale infernale. "Nikita" débute exactement comme "Le grand bleu" : un survol rapide du plancher zéro, sur une musique d’Eric Serra, dont je parlerai plus tard. Sauf qu’au lieu de dévaler les eaux, on file à toute vitesse sur le macadam humide jusqu’à la devanture d’une pharmacie où de jeunes junkies s’affairent. Les premières minutes sont efficaces, et accrochent définitivement le spectateur. Le scénario est tendu à souhait, bien rythmé, précis, sans perdre de temps dans des phases de transitions inutiles et qui n’auraient pas enrichi le propos, si ce n’est peut-être à développer un petit peu plus la psychologie des personnages.
J’estime cependant que nous en savons bien assez sur eux, car n’oublions pas ce qu’ils font n’est pas recommandable, que ce soit d’un côté de la barrière, ou de l’autre. D’ailleurs, les secrets sont bien gardés, et que Nikita ni Marco ne connaissent le passé ni de l’un ni de l’autre.
Ceci revient à dire que le montage est irréprochable, tout comme la réalisation car nous savons toujours exactement où nous en sommes, bien que l’histoire se déroule sur plusieurs années. Et surtout, les plans de caméras permettent de faire un focus sur les personnages principaux, rendant le tout incroyablement prenant. Côté casting, il n’y a rien à redire : chaque comédien est parfait. Anne Parillaud joue un vrai rôle de composition, en interprétant cette jeune junkie désocialisée et ayant perdu le sens des réalités. Mais ce n’est pas tout : elle bluffe le public de sa capacité à se transformer, à se transfigurer pour chaque étape marquée dans l’évolution de son personnage. Elle mérite amplement le César qu’elle a reçu. Tchéky Karyo est dans un des rôles dans lequel il excelle : froid, méthodique, implacable, ce genre de rôle qu’il va retrouver dans "Le baiser mortel du dragon". Nous retrouvons également Jeanne Moreau, et prête même à sourire lorsqu’elle doit enseigner le sourire à sa pouliche alors qu’elle-même a un visage austère et dur, dénué du moindre rictus censé montrer l’exemple. Marc Duret figure encore une fois au casting d’un film de Besson, cette fois en Rico totalement déjanté, et il excelle. Et puis évidemment, quel plaisir de retrouver Jean Reno, cette fois en nettoyeur, un rôle expéditif expédié en quelques minutes presque trop courtes. De la même façon que Besson a eu la riche idée de mettre une héroïne sur le devant de la scène, il a pris le risque d’amener de la douceur par l’intermédiaire… d’un homme : c’est Jean-Hugues Anglade qui s’y est collé, avec beaucoup de cœur, et ça lui va bien. Si on regarde bien le casting dans son ensemble, on remarquera que Besson s’entoure souvent des mêmes artistes, qu’ils soient comédiens, ou compositeurs. Une fois de plus, c’est Eric Serra qui a signé la partition, dont chaque thème accompagne de façon ultra-efficace chaque moment du film. Aujourd’hui, je m’interroge sur la genèse de "Nikita". Bon, officiellement, l’idée de faire un film sur une femme portant son prénom est née de la chanson "Nikita" d’Elton John. Mais faire un film sur les agissements secrets du gouvernement, il fallait oser quand même ! Surtout après les disparitions tragiques de Philippe de Dieuleveult en 1985, de Daniel Balavoine et de Coluche en 1986, des décès survenus lors de circonstances que bon nombre de gens s’accorde à penser qu’ils sont louches… Comme quoi, prendre des risques s’avère parfois payant, et Luc Besson a su le faire. Et de quelle manière !!!