Avis mitigé… Que dire réellement de ce film ? Déjà, j’ai attendu un certain temps avant de le voir, en particulier parce que je suis une fan incontestée de l’œuvre originale de Bram Stoker et je rejoins l’avis d’Oscar Wilde qui disait qu’il s’agissait peut-être là du plus beau roman de tous les temps.
Je dois dire que le choix de Coppola de suivre la réalité historique plutôt que le roman a transformé l’histoire originale en quelque chose de vraiment magistral et a apporté une véritable force à l’œuvre. La tragédie de cet homme, rendu fou de désespoir par la perte de celle qu’il aime et qui, en reniant Dieu devient alors un être abject à l’existence maudite, obligé de se nourrir du sang des vivants en échange d’une immortalité dans la solitude ; est juste sublime. Cela apporte une vraie profondeur et une réelle complexité au personnage du Comte.
Ensuite, je tiens particulièrement à féliciter les performances Winona Ryder, Anthony Hopkins et Gary Oldman ( juste sublime dans le rôle du Comte ) et pour aller au fond des choses, il faudrait aussi féliciter le réalisateur pour son souci de l’esthétisme ( à l’exception de quelques effets spéciaux pas forcément indispensables ) et le choix des musiques, qui sont justes parfaites.
Maintenant, nous arrivons au fond du problème. Je suis d’accord de la nécessité, en changeant l’histoire, de trahir l’œuvre originale et ainsi, de transformer les personnages ( notamment ceux de Mina et du Comte ) . Je comprends aussi la nécessité de transformer le personnage de Jonathan Harker, qui dans le roman est un modèle de force mentale et de sang froid, pour en faire une espèce d’invertébré tout tremblotant, au charme proche de celui de la carotte bouillie ( mention spéciale à Kenu Reaves et à son interprétation… ). Il faut bien rendre le personnage d’Harker moins attirant pour mettre en valeur le Comte c’est bien normal, je l’accorde.
Ce que je ne comprends pas et ce qui me gâche mon plaisir à la vision de ce film, c’est cette tendance, surtout au début du film, à un érotisme vulgaire, complètement hors de propos. Le personnage de Lucy est maltraité pour en faire, comme il est si bien dit dans le film « une putain du diable ». C’est véritablement honteux, dans la mesure où c’est la tragédie que constitue la mort de cette personne si pure et si admirable qui conduit tous les personnages à se regrouper et à venger son décès dans le roman original. D’ailleurs c’est cela qui semble manquer à l’œuvre de Coppola, son total manque de cohérence entre les personnages de Seward, Morris, Arthur, Jonathan Harker et Van Helsing, dont le personnage, au lieu d’apporter l’unité et de conforter les jeunes hommes dans leur devoir, passe ici pour un vieillard un peu cinglé ( paradoxalement l’interprétation d’Hopkins est très bonne d’ailleurs ). Et c’est cela à mon sens qui manque cruellement à ce film : le manque d’unité dans ce groupe, car face à un tel monstre que Dracula, il c’est leur unité, leur confiance mutuelle et le profond attachement qui les lie les uns aux autres , qui constituent leurs meilleurs armes.
Les personnages originels sont viciés (mention spéciale au Docteur opiomane, à cette chère Miss Westenra vulgaire au possible de son vivant et à Harker, en captivité … ) pour assaisonner une œuvre qui aurait pu être magistrale d’une soupe lubrique de mauvais goût, surement destinée à rameuter plus de monde dans les salles.
Après, je conçois que cela ait pu sembler nécessaire au réalisateur. Sexe et sang sont peut être si intimement liés dans notre inconscient qu’ils sont maintenant difficile à dissocier l’un de l’autre. C’est peut-être aussi une volonté de transposer l’œuvre dans une époque plus proche de la nôtre, avec la vision bien spécifique à notre époque.
Personnellement, c’est malheureusement ce qui m’empêche de donner une note maximale à ce film et à crier au génie. On est passé de peu à côté du chef-d’œuvre…