Déjà ancré depuis quelque temps aux États-Unis, Costa-Gavras continue d'aborder le fascisme après La Main droit du Diable avec Music Box, où il met en scène le procès d'un bon père de famille réfugié hongrois aux USA accusé d'avoir été membre d'une section spéciale nazie durant la Seconde Guerre mondiale.
Assez vite, Costa-Gavras rentre dans le contexte de l'oeuvre et dévoile l'accusation qui plane sur le père, réfutant d'avoir été un criminel de guerre et mettant en avant qu'il a toujours été un citoyen modèle américain, comme peut en témoigner sa fille, une brillante avocate qui va le défendre. Peu à peu, le metteur en scène de Missing jette un regard troublant sur cet homme, laissant planer un soupçon de doute sur son véritable passé, ce qui se ressent pleinement sur l'ambiance de l'oeuvre, où, plus le procès avance, plus il accentue cette ambiguïté.
Costa-Gavras se montre assez sobre derrière la caméra, et surtout d'une grande justesse où il fait preuve d'intelligence dans le traitement de ces thématiques plutôt compliquées. Il met en avant un homme face à son passé, mais aussi sa famille et son entourage, où les doutes et la confiance vont plus ou moins se mêler. Il ne tombe jamais dans un quelconque excès ou manichéisme mais rend son oeuvre pertinente, en plus d'être passionnante, tout en jetant une petite pique envers la "terre d'accueil" qu'était les USA, prête à accepter l'aide de n'importe qui surtout pour lutter contre le communisme. Là où Music Box est aussi remarquable, c'est qu'il met en scène avant tout un portrait de femme, une avocate sûre d'elle malgré les accusations lourdes et difficiles, faisant ressortir toute la réflexion mais aussi l'émotion des protagonistes, et d'elle en particulier malgré quelques légères maladresses dans le final.
Face à ce passé, dans tous les cas, difficile à assumer, Costa-Gavras trouve toujours le bon équilibre entre les différents thèmes et personnages abordés. Il rythme son film par des dialogues toujours justes et une ambiance qui tient sur toute la durée, tandis que plusieurs séquences sont remarquables, montrant tout le talent du cinéaste grec, que ce soit lors du procès ou du retour sur les terres de vérités. Jessica Lange livre une composition sensible et émouvante en femme forte voulant croire son père, tandis qu'Armin Mueller-Stahl laisse toujours planer un doute sur son personnage.
Costa-Gavras trouve un sujet à la mesure de son talent, sachant retranscrire toute la difficulté, le trouble, la pertinence et l'émotion de son oeuvre alors qu'il met en scène un homme, et sa fille, face à un passé douloureux, que ce soit historique ou intimiste.