Premier film pour la télévision suédoise réalisé par Bergman en 1968, "Le rite" est un film un peu en-dessous, dans la filmographie des années 60 de Bergman (si l’on excepte "Toutes ses femmes" seul film vraiment faible du cinéaste). Arrivé après des chefs d’œuvre absolus tels que "Persona", "L’heure du loup", "La honte", ou encore "A travers le miroir", "Le rite" semble faire un peu "redite", et marque un certain essoufflement de la créativité du cinéaste. Est-ce le fait de travailler pour la télévision qui lui permet de s’accorder la possibilité de faire en partie du déjà-vu et du déjà-dit ? Peut-être, mais en partie seulement, car il y a, dans "Le rite", une radicalité de la mise en scène encore inédite chez Bergman : 4 personnages seulement, filmés en gros plans sur fonds unis (pas ou très peu de décors), une trame narrative composée de scènes introduites par des cartons. Il y a là comme un minimalisme de la mise en scène qui donne au film un aspect froid et une noirceur terrible. Les personnages apparaissent comme désabusés ou fous, certains étant complètement ravagés par l’humiliation (Hans, le juge). Le travail que Bergman réalise sur ses personnages est fascinant : nous avons un mal fou à les cerner (en même temps, ce sont des acteurs...), à distinguer ce qui relève de la représentation ou pas, nous ne pouvons que percevoir leurs douleurs et leurs souffrances. En cela, "Le rite" est un film dur et opaque, mais malgré tout d’une grande richesse thématique, avec notamment des dialogues remarquablement écrits. La dernière scène, celle de la mise en scène du rite, est particulièrement étrange et inquiétante, et on suppose qu’un cinéaste comme Greenaway s’en est fortement imprégné… Avec ce film, Bergman semble clore une période, finir un travail d’expérimentation formelle. Son chef d’œuvre suivant, "Une passion", sera un véritable accomplissement esthétique, avec, pour la 1ère fois (exception faite encore de "Toutes ses femmes"), la couleur...