Avec Shocker, Wes Craven réalise un film très spécial qui marquera les esprits mais pas forcément pour de bonnes raisons. L'histoire se situe dans la banlieue de Los Angeles ou un tueur en série commet des crimes sanglants. Ses dernières victimes sont la famille de l'inspecteur en charge de l'arrêter, à qui il ne reste plus qu'un fils adoptif qui va l'aider à enquêter sur l'affaire suite à des rêves prémonitoires lui permettant d'en savoir d'avantage sur le tueur. Ce scénario, encore bien plus grotesque au fil des minutes que son synopsis de départ laisse suggérer, annonce assez tôt la couleur puisque dès les premiers instants on se retrouve devant un long-métrage à l'allure de nanar, la faute entre autre à un ton dissonant entre sérieux et légèreté qui ne sait pas sur quel pied danser. Dans un premier temps, ce style est sympathique, car surprenant et amusant, mais l'attirance fini par baiser sur la durée à cause de sa redondance et de son absence de profondeur. Hormis son côté atypique, le récit n'a rien d'autre à proposer et cela se ressent à la longue surtout que la blague dure une heure quarante. Cette originalité fini par lasser même si la confrontation donne lieu à quelques scènes appréciables et à une dose de violence juste suffisante. Mais son plus grand point fort, qui fait qu'on s'accroche à cette intrigue loufoque, c'est bien son ambiance singulière particulièrement réussie mêlant horreur, thriller et fantastique. Elle donne au film un côté presque hypnotisant, malgré de nombreux défauts. Le principal est le niveau de jeu des comédiens, sûrement dû à une direction d'acteur douteuse. Il suffit de voir les réactions des personnages pour s'en rendre compte. On ne croit pas une seule seconde au drame qu'ils subissent tant ces rôles sont interprétés par un casting dont il vaut mieux taire les noms. Pourtant, leurs visages ne sont pas désagréables mais tout sonne faux, même le tueur sadique et déterminé est ridiculisé, ce qui le rend tout de suite moins menaçant. Les dialogues ne sont pas étrangers à cela. En effet, les répliques qu'ils s'échangent sont complètement risibles et brisent immédiatement tout semblant d'émotion que le film tente quand même étrangement de distiller. Sur la forme c'est à peine mieux puisque la réalisation de Wes Craven est globalement convenable, mais comporte aussi bien quelques excentricités discutables, que des petites fulgurances appréciables. Un visuel là encore en dents de scie, qui comporte quelques scènes esthétiquement séduisantes mais aussi des passages immondes à cause des effets-spéciaux grossiers, à la limite du parodique. Des images accompagnées par une b.o. également contestable dans une moindre mesure. Autant certaines de ses compositions sont dans le ton et renforcent l'atmosphère, autant d'autres dénotent totalement avec le propos ce qui casse toute l'immersion. Reste une dernière partie qui part dans un délire complet, perdant ainsi définitivement le peu d’intérêt qu'il restait, avant de se conclure sur une fin sans saveur. Au final, Shocker est un film difficile à saisir au niveau de ses intentions. Tous ses défauts, volontaires ou non, lui confère un certain charme et en ferait presque un plaisir coupable. Ce n'est pas un bon film mais il mérite tout de même d'être découvert tant c'est une expérience à part.