L'un des films de Stanley Kubrick que j'ai le moins apprécié, sans doute à cause de son côté trop conventionnel. Pour moi, le réalisateur n’atteint les sommets qu'avec son Docteur Folamour ; pour ne plus les quitter. Or, avant Docteur Folamour, il y a eu Lolita ; et avant Lolita, Spartacus.
Comprenez moi bien. Je ne dis pas que je n'ai pas aimé. Je dis juste qu'il manque au film le côté anticonformiste qui m'avait séduit et qu'on retrouve dans tout les autres Kubrick. On a l'impression de se retrouver devant un péplum épique, blockbuster des années 60. Et pourtant, Stanley Kubrick disait lui même : "L'une des choses que j'ai voulu éviter en filmant Spartacus, c'était de le traiter comme un péplum." Personnellement, mais ça n'engage que moi, je trouve que l'objectif n'a pas été atteint. C'est ce en quoi le film m'a déçu.
Cela s'explique sans doute, en partie, par les conditions particulières dans lesquelles a été tourné le film. A savoir que Kubrick a récupéré le train en marche, si je puis dire. Kirk Douglas, le producteur exécutif et acteur principal, avait déjà confié la réalisation à Anthony Mann. Mais suite à des désaccords, il quitta le projet ; lequel fût confié à Stanley Kubrick.
Et c'est là que ça devient intéressant. En effet, Spartacus, c'est le seul film du réalisateur américain où il n'aura pas un contrôle absolu sur la production, devant respecter les choix souverains de Kirk Douglas. Sur ce sujet, il en dira : "Quand Kirk m'a proposé de réaliser le film, j'ai pensé que je pourrais en faire quelque chose, à condition de pouvoir modifier le scénario. Mais mon expérience m'a montré que, s'il n'est pas spécifiquement stipulé dans votre contrat que vos décisions seront respectées, il y a de fortes chances pour qu'elles ne le soient pas. Le scénario aurait pu être amélioré au cours du tournage mais ça n'a pas été possible. Kirk était producteur exécutif. C'étaient lui, Dalton Trumbo le scénariste et Edward Lewis le producteur, qui décidaient de tout."
Dès le départ, il apparu évident que Kubrick et Douglas n'avaient plus les relations amicales qu'ils avaient pu avoir sur le tournage des Sentiers de la Gloire. Avec le recul, on peut supposer que Douglas avait peur de la renommé de Kubrick. Il avait sans doute peur qu'il vienne lui voler la vedette et la paternité du projet. Et quand on voit quel monstre du cinéma est devenu le réalisateur américain, on ne peut que constater que cette peur était justifiée. Pour preuve, aujourd'hui, quand on parle de Spartacus, on parle de Kubrick et non pas de Douglas.
Pour finir, les deux hommes ne se réconcilièrent pas. Douglas en dira : "certains réalisateurs sont talentueux, d'autres sont des salauds ; Kubrick est un salaud talentueux."
Pour en revenir au film en lui même, comme je l'ai dis au début, je le trouve trop conventionnel, pas assez spécial, trop commun. (Quoiqu'à l'époque, il pouvait apparaître comme assez atypique.)
Après, c'est sûr qu'on est loin, pour autant, de passer un moment déplaisant. Le film est un très bon péplum épique de trois heures, qui a extrêmement mal vieilli visuellement (mais c'est ce qui fait son charme aujourd'hui). Et puis, pour tout ceux qui sont intéressés, voir fascinés, par la période antique, vous ne pourrez qu'être séduit.
En résumé, un film qui surprend dans la filmographie du réalisateur ; mais qui n'en reste pas moins assez sympa.