Je suis un peu déçu, La Mort aux trousses est réputé comme un des meilleurs Hitchcock, mais je n'ai pas réussi à rentrer complètement dedans. C'était déjà le cas avec Fenêtre sur Cour (mon préféré), mais le huis clos, la présence de Grace Kelly et surtout la toute dernière partie du film avaient fini par me convaincre. Ici, la scène marquante (l'attaque de l'avion) arrive en milieu de film, ce qui ne marque pas autant que si c'était à la fin. Toutefois, elle symbolise à elle seule tout le génie du réalisateur. Pour rappel, Cary Grant attend près d'un arrêt de bus, au milieu de nulle part, et se fait soudain pourchasser par un avion armé d'un mitraillette. Tout d'abord, le paysage est magnifique, les couleurs de cette étendue de poussière à perte de vue, l'ambiance sonore, tous les éléments convergent pour donner une scène mémorable. Mais le summum du génie est le placement du personnage dans le cadre (pas que dans cette scène d'ailleurs). En quelques plans fixes, on a compris : le personnage est seul, perdu, et abandonné de tous. Et puis l'avion, qui était présent en fond, décide d'attaquer le héros. Le fait particulièrement marquant est que cet assaut est complètement anonyme, on ne verra jamais le pilote. Du grand cinéma. J'ai quelques réserves concernant le personnage d'Eve. J'apprécie le fait qu'elle soit l'exacte opposé de Pamela dans Les Trente-Neuf Marches : elles rencontrent toutes les deux le héros fugitif dans un train, mais Eve décide directement de l'aider, là ou Pam le dénonce directement de le dénoncer à la police. De plus, Eve est directement attirée par le héros tandis que Pamela ne fait que se disputer avec lui. Le parallèle est trop visible pour être une coïncidence. J'aime aussi le fait que les répliques d'Eve, en tant que femme fatale, soient nonchalantes, avec une pointe d'humour. Malheureusement le jeu de Eva Marie Saint est assez maladroit sur ce point. Il est loin d'être mauvais, mais la façon de dire certaines phrases, certains mots, je trouve qu'elle n'a pas réussi à transmettre toute l’ambiguïté du personnage. Dommage. Le fait que je ne soit pas rentré dedans n'enlève rien à la qualité du film, qui est une pépite, comme souvent avec Hitchcock.