La mort aux trousses est un chef d'oeuvre incontesté de l'histoire du cinéma et, avec Sueurs froides, le meilleur film d'Alfred Hitchcock. Ces deux films ont d'ailleurs en commun de représenter les deux facettes de l'oeuvre du maître du suspens et d'avoir suscité de nombreuses sources d'inspiration tant au cinéma qu'à la télévision. La mort aux trousses combine à la fois un rythme effréné, sans temps mort pour le cinéphile, mâtiné d'un suspens qui ne faiblit jamais, un grand sens de l'esthétisme des plans (belles visions de l'ONU, architecture raffiné de la maison aux monts Rushmore), une très grande direction d'acteurs (Cary Grant est tout à la fois élégant, drôle, fragile et persévérant, tout en nuance féminine et enfantin (voir les relations, très funny avec sa mère, d'ailleurs pas si âgée que cela dans le film), Eve Marie Saint dans son plus grand rôle, hyper sexy, s'écartant de ce fait du type de filles blondes et glaciales hitchcockiennes, son déplacement devant la caméra est d'une grâce incomparable et James Mason en méchant époustouflant et torturé, est un "vilain" très réussi), un humour hyper présent (voir les scènes avec la mère du héros dans l'ascenceur -inédite à la Marx Brothers ou le moment de la vente aux enchères). Les véritables morceaux de bravoure surabondent dans le film, tels Thornhill ivre au volant de sa voiture ou poursuivi par l'avion dans le champ de blé, sa fausse mort au restaurant et bien sûr la magnifique et maîtrisée scène de la lutte aux flancs du mont Rushmore. Hitchcock parvient à tout réussir à la fois et son obsession se porte ici, comme l'a souligné Nicolas Saada dans un bonus du film, sur les trajectoires verticales, horizontales (déjà mises en évidence lors d'une magnifique ouverture) qui se portent sur les différents moyens de locomotion (train, voiture) et buildings jusqu'au clin d'oeil sexuel quand le train pénètre dans le tunnel, allusion à ce qui va se passer entre les deux héros. Ici peu importe la crédibilité de l'histoire et du quiproquo improbable de Kaplan/Thornhill au début du film, le cinéphile s'amuse sans retenue. La mort aux trousses influenca plusieurs séries TV tels 24 heures, Le fugitif et surtout Les envahisseurs (deux épisodes : L'innocent et Cauchemar, très nettement référencés) et de futurs cinéastes tels Paul Greengrass dans les deux Jason Bourne ou Brian de Palma même si ce dernier s'inspire plutôt de la veine Vertigo. Un film que je classerais dans mon top 20 de l'histoire du cinéma.