Le cinéma de Bill Plympton, c'est un monde à part. Un monde où il fait presque tout : le scénario, les dessins, la réalisation, la production... Il va même jusqu'à vendre ses DVD lui-même dans les festivals de cinéma (comme au festival de San Sebastián 2013). Bref, c'est le roi le l'animation indé US autoproduite, artiste limité financièrement, mais totalement libre sur un plan artistique. Plympton creuse son sillon dans un registre d'animation artisanale, loin des évolutions numériques, et surtout dans un registre imaginaire qui n'appartient qu'à lui, délirant, trash, gore, sexuel, exprimé dans un style exubérant et outrancier, toujours surprenant, souvent très drôle, mais aussi parfois très lassant... Lassant sur la durée d'un long-métrage, comme dans L'Impitoyable Lune de miel ou Les Mutants de l'espace, alors que le format court convient certainement mieux à son inspiration détonante et corrosive. Mais ce Hair High constitue une bonne surprise : avec un scénario plus structuré, une intrigue centrale suivie jusqu'au bout, Plympton évite de partir complètement en vrille et de lâcher le spectateur en cours de route. L'univers référentiel donne par ailleurs quelques repères, puisque le réalisateur croque ici, à sa façon, l'Amérique des fifties, une certaine mythologie US (chronique lycéenne, belles bagnoles, héros sportif, love story, scène de bal...), avec toutes sortes de clins d'oeil aux cinéphiles (La Fureur de vivre, Grease, Carrie...). Il y a enfin suffisamment de variété dans le récit et dans le rythme pour éviter que le film ne s'essouffle trop. Hair High est ainsi, probablement, le long-métrage d'animation le plus "accessible" de Plympton, le moins jusqu'au-boutiste dans le délire, le plus "lisible", le plus "regardable". Ce qui ne signifie pas que le cinéaste se soit assagi. Heureusement. On se délecte toujours de scènes invraisemblables : un prof qui crache ses poumons, un ado-poulet terriblement en rut, un couple de squelettes qui reprend vie au fond des eaux (quelque part entre La Nuit du chasseur et les farces macabres de Tim Burton)... Toute cette folie est aussi déconcertante que réjouissante.