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Un visiteur
5,0
Publiée le 29 septembre 2006
Remarquable film, les acteurs sont extraordinaires, et le film transmet bien la grisaille et le délaissement que tous pouvons vivre à un moment où un autre.
Ceylan, c'est lent. Jeu de mot facile, mais tellement adapté au film en question. Amateurs de grand spectacle pétaradant, passez votre chemin. Ici, on se retrouve sur les terres de Tarkovski (cité longuement dans le film), de Guney, d'Antonioni. Et c'est plutôt réussi, car on ne s'ennuie pas, malgré l'absence de musique et de dialogues (si peu nombreux en vérité !). Alors, quel est l'intérêt d'un tel film ? Tout d'abord, le cinéaste arrive à distiller une ambiance morne qui convient parfaitement à son histoire : celle d'un artiste plus ou moins raté qui vit seul et qui est désabusé. Mais aussi l'histoire de ce jeune villageois qui arrive en ville plein de rêves et qui n'arrivera à rien d'autre qu'une errance prolongée dans une ville désincarnée. Tout est silencieux dans cette oeuvre qui montre une société turque en crise. Certains ont tout le confort matériel, mais il leur manque une dimension spirituelle, d'autres n'ont rien et personne ne peut rien pour eux. Cette société est alors marquée par l'individualisme, qui fait que les deux hommes ne vivent pas ensemble, mais à côté l'un de l'autre. L'incommunicabilité (thème antonionien par excellence) éclate durant la totalité d'un film sobre, au cadre très étudié et aux images splendides. On n'est pas près d'oublier l'image saisissante de ce cargo échoué non loin du port. Un film difficile, qui se mérite.
Comme tous les films indépendants de pays à la culture très différente de la nôtre, il faut un certain temps d'adaptation à la manière dont les gens communiquent. Souvent, ces films sont grevés par une longueur ou une lenteur d'action excessive à nos habitudes cinématographiques.
Ainsi, comme pour 5 heures de l'après-midi que j'avais vu précédemment, Uzak est un film lent et posé, un film qui déroule une intrigue minimale et avec des dialogues peu fournis. Mais l'ambiance qui est distillée est fantastique. Les décors naturels d'Istanbul sous la neige contribuent aussi beaucoup à cette impression, et à l'histoire même.
Le film évoque l'arrivée à Istanbul d'un jeune homme de la campagne, sans emploi, qui se rend en ville en espérant devenir matelot sur un des navires qui quittent le port tous les jours. Il va loger chez un homme originaire de son village, et qui a relativement réussi en tant que photographe de publicité. Les deux hommes ont du mal à communiquer, entre le jeune qui pense qu'il va vite trouver un travail et apprend à gérer ses déboires, et le plus âgé qui, ayant renoncé à la photo d'art et au cinéma pour un secteur plus lucratif, a du mal à partager son appartement. Ce dernier est surtout critique et irascible envers son invité dont il réprouve les manières et l'attitude. On sent bien chez le photographe la désillusion profonde de ne pas être devenu celui qu'il aurait aimé, et son aigreur auprès du jeune homme qui veut juste trouver un boulot.
Les deux comédiens sont excellents, et leur communication est finalement bien peu verbale mais d'une rare intensité. Et puis, il y a surtout cette manière de filmer, de laisser le temps filer et de se poser sur des plans superbes. On sent le talent de photographe du réalisateur, qui pose un oeil sensible et épris sur son pays et nous fait partager sa beauté et la sérénité de ses paysages.