Que l’on ne s’y trompe pas, " Les invasions barbares " n’est pas un film mélodramatique. C’est le coup de poing dans le plexus, l’injection d’adrénaline en plein cœur : un choc cinématographique. Sans aucune des grosses ficelles du drame, Denys Arcand frôle la quintessence de la nature humaine. Au-delà de leur cynisme décapant, de leur optimisme forcené, dépassant frustrations et déceptions nées de la confrontation à la vie, ces "quinquas" demeurent sublimement humains, tour à tour féroces, tendres, impertinents, faibles, violents, subtils ou râleurs, à l’image de la construction du film qui alterne joutes verbales, émotions intenses, humour potache et interrogations existentielles. Parmi toutes ces doctrines en "isme" qu’ils ont partagées, maoïsme, déconstructionnisme, féminisme, séparatisme... pour reprendre les mots des personnages, il en est une à laquelle ils n’ont pas cédé : l’individualisme. Comme si, la seule valeur refuge, l’unique barrière au néant, c’était la solidarité, la famille, au sens large, qu’elle soit de sang ou non. Une petite comédie humaine qui nous rapproche de la vérité essentielle et nous rappelle gravement que, pour citer Socrate, nous ne nous en approchons, que dans la mesure où nous nous éloignons de la vie.