Des films qui montrent que les camps de concentrations n'étaient pas des colos de vacances il y en a quand même quelques uns, mais celui là à une renommée toute particulière, en effet Rivette lui a reproché son voyeurisme. Il expliquait qu'on ne peut pas tenter de retranscrire l'atrocité des camps, parce que sinon ça ne serait pas supportable pour le spectateur, mais le metteur en scène va le présenter comme "réalité". J'avoue être à 100% d'accord avec Rivette sur ce point. On peut reprocher ça au film. Tout comme on peut lui reprocher son fameux travelling esthétiquement parfait. Je me demande d'ailleurs ce qu'il peut bien penser de films comme la Rafle (que je n'ai pas vu, mais que Kapo n'a donné envie de voir, histoire de rire un bon coup).
Alors Kapo, malgré ses reproches très intellectualisés de Rivette que je comprend, et que je partage (enfin j'avoue que je n'y aurai pas pensé seul, mais sa pensée tiens la route, et ça sera l'un des petits bémols que je mettrai au film (sauf que ça ne m'a pas empêché d'adorer le film)) le film est un petit régal de mise en scène, d'écriture de personnages, une sorte de mélodrame parfait, absolument déchirant, éprouvant.
Le film possède une musique splendide, utilisée avec intelligence et parcimonie, rendant la scène déchirante à chaque utilisation.
Le film commence tout de suite très fort, le personnage en quelques plans est cerné, une petite fille fragile et on la voit au fur et à mesure du film se déshumaniser. C'est vraiment perturbant, on ne peut pas s'identifier à elle, on a envie que le héros ne soit pas la méchante Kapo qu'elle devient. C'est très déstabilisant et c'était une idée de génie. La fin quant à elle, tombe dans quelque chose de plus classique, rédemption etc, alors ça serait un autre bémol au film (la fin et son histoire d'amour a été imposé si j'en crois mes sources par les producteurs, parfois ils feraient mieux de se taire) vu qu'elle redevient une héroïne, j'avais vraiment peur que ça tombe dans le culcul débile, sauf que c'est encore une fois fait avec une main de maître et une grande maîtrise et ça parvient à être touchant, je dirai que c'est le principal, même si j'aurai préféré je pense une version plus sombre, plus dérangeante où la déshumanisation de cette jeune fille continue.
Le film sinon est vraiment beau visuellement (détail qu'on pourrait reprocher comme Rivette), ce qui tranche avec la dureté de l'action.
Si on arrive à passer outre ce côté malsain je l'accorde c'est un film vraiment génial.
Je suis tiraillé, j'ai beaucoup aimé, même si du point de vue de l'éthique c'est discutable.
En tous cas lorsqu'un bon réalisateur s'empare de la Shoah ça fait des bons films, ça me donne envie de voir le film de Lanzmann et d'aduler Resnais pour son nuit et brouillard.