Par nature, les biographies sont contestables; celle de Pétain, chef de l'Etat français, l'est d'autant plus qu'elle prête toujours à polémique. Le film de Jean Marboeuf est conformiste. Tant du point de vue de la mise en scène, très sagement attachée à une chronologie des faits, que de celui de la personnalité supposée d'un Pétain vieillard conservateur ou réac, pas très responsable et dépassé par les évènements.
On ne sait trop quelle est la part d'authenticité de ce portrait indulgent mais le film a au moins le mérite de son didactisme. Autour de Pétain gravitent, entre ironie et caricature, quelques hauts personnages et fonctionnaires du régime de Vichy, ministres pour la plupart médiocres et futiles qui témoignent de la poltique de collaboration. Parmi eux, Laval est le seul à faire figure de politicien avisé (encore que...) et conséquent quoiqu'indigne. Le couple Pétain-Laval, sur lequel se concentre le récit, n'est pas réhabilité mais Marboeuf, suivant en cela le postulat de certains historiens, se refuse de l'accabler, lui reconnait un esprit patriotique et le juge sans passion ni haine.
Mais, si le cinéaste réussit à reconstituer l'ambiance de l'hôtel du Parc, entre anecdotes et faits historiques, le film, même long de plus de deux heures, ne peut exprimer tout le Pétain de l'Occupation et tout un régime. Certains aspects sont occultés et l'essence-même de l'Etat français, c'est à dire ses courants de pensée et ses obligations de vaincu, est malheureusement et forcément survolée. Quoiqu'on en pense, Jacques Dufilho et Jean Yanne sont deux excellents interprètes et contribuent à l'intérêt du film, sinon à sa valeur historique.