Quand une première œuvre a fonctionné, quel que soit son domaine, on envisage très rapidement une suite afin de surfer sur sa popularité. Le cinéma n’est pas exempt de ce modèle économique, de grands films ayant connu des suites tantôt mauvaises (Le fils du Mask, Les Bronzés 3), tantôt bonnes (Ocean’s Twelve) et parfois même supérieures (The Dark Knight). Pressé de livrer une copie de « Retour vers le futur », Robert Zemeckis livrera exactement ce qu’on lui a demandé… ainsi qu’un exercice de style qui marquera le cinéma de divertissement.
Cet épisode deux se collera directement à la fin du premier volet, obligeant à retourner complètement la séquence afin de remplacer l’actrice jouant Jessica, la copine de Marty.
Le sort qui lui sera réservé reste révélateur de l’aspect satirique et non réfléchi de cette fin originale, critiquant une forme de capitalisme qui aura touché la famille McFly. Cette même fin conduira indirectement à un autre choix narratif, la mort du père de Marty, suite au désistement de Crispin Glover. Cette absence marquera ainsi la narration de manière durable, Marty devant sauver à nouveau un père de sa propre volonté cupide. Cet arrière-plan reste passionnant par ce qu’il prolonge au fur et à mesure de la trilogie sur les pères, spirituels ou non, et leur influence sur notre héros.
Le long-métrage captive aussi par sa manière de réécrire le premier volet et aller jusqu’au bout de ses paradoxes temporels. Le film joue de son statut de suite pour se réapproprier narrativement l’opus original, tout en constituant un véritable défi technique dans certaines séquences. C’est ainsi que les remarquables maquillages originaux laissent place à des interactions entre des personnages incarnés par le même acteur, que ce soit la famille du Marty du futur ou la rencontre entre le Doc et son lui du passé. La technologie reste, comme toujours chez Zemeckis, inscrite dans la volonté de raconter une bonne histoire et passe avec une telle fluidité que, tel un bon magicien, on se rend compte du tour seulement après qu’il ait été effectué.
Le film est également marqué par
son statut d’épisode central d’une trilogie. Le troisième épisode, pur western à réévaluer, devait ainsi constituer le climax de cette suite avant d’être finalement prolongé en film à part entière pour des raisons financières. Néanmoins, sa manière d’être annoncé en avance reste intéressante, surtout à une époque où divers blockbusters, fonctionnant avec une construction de séries, sont plus proches de bandes annonces pour le film suivant qu’une œuvre à part entière. Les indices disséminés ci et là sont assez discrets pour la personne n’ayant toujours pas vu ce deuxième « Retour vers le futur » (y en a-t-il encore ?) pour ne pas gâcher la séance tandis qu’ils feront sourire le fan un peu plus connaisseur, sans réduire à néant la place particulière de ce deuxième volet.
Toujours porté par la mise en scène aussi passionnée que passionnante de Zemeckis, « Retour vers le futur 2 » est un exemple concret de suite parfaite, osant jouer de son statut pour se sortir de la case de pur produit financier dans laquelle on cherchait à l’enfermer. C’est un divertissement de grande qualité qui ne vieillit que par sa représentation de 2015, malheureusement pour ceux qui espéraient se promener tous les jours en hoverboard…