Dernier film de Fernandel, Heureux qui comme Ulysse est un très joli conte, simple et brillant à la fois, qui ne joue pas uniquement la carte de l’émotion, mais aussi celle de la qualité formelle.
Le métrage, côté acteur, est clairement emporté par Fernandel. Entouré de seconds rôles provençaux bien typés et drôles, il reste le point central du casting, et impose un jeu remarquable. Je ne suis pas spécialement fan de Fernandel, mais il faut avouer qu’ici qu’est-ce qu’il dose bien la drôlerie et l’émotion. Il est brillant, et son personnage, original, est une réussite d’écriture. Il forme un duo complice avec ce cheval qui devient un personnage à part entière, pour tout dire, le personnage éponyme, puisqu’Ulysse, c’est lui !
Un très bon Fernandel au service d’une histoire qui, par bien des aspects, pourrait rappeler La Vache et le prisonnier. Aventures cocasses, road-movie, et puis un duo avec un animal, et ici avec un cheval à la place de la vache. Pour autant ce n’est pas le même contexte ni la même approche. L’intrigue est simple, avec Fernandel qui ne se résout pas à conduire son cheval à la mort, et va aller en Camargue du coup. Même s’il y a quelques longueurs, peut-être, parfois, un petit tassement niveau enjeux avec quelques vivotages (la discussion assez longue avec le gendarme), l’histoire est belle, simple, menée dans un temps raisonnable (moins d’1 heure 30), et avec beaucoup de poésie. L’émotion est aussi bien là, mais jamais facile, fabriquée, et pour le coup c’est vrai aussi que le jeu solide de Fernandel remplit pleinement son rôle jusqu’à la fin.
Heureux qui comme Ulysse c’est aussi un brillant travail formel. De très beaux décors naturels, des paysages superbes, une photographie lumineuse qui rend ce sud de France magnifique, et une mise en scène simple, contemplative, signé d’un Colpi que je ne connaissais pas comme metteur en scène mais qui semble vraiment avoir beaucoup de talent. Ce film est frais, lumineux, sans effet de style tapageur et en même temps pas non plus statique. Et puis, là-dessus une superbe bande son, non seulement avec la chanson de Brassens, mais pas que ! La musique est toujours utilisée à propos et elle est très agréable.
En toute honnêteté cet Heureux qui comme Ulysse est une très belle découverte, un de ces films qui font du bien, à la fois car ils ont un fond plein d’intérêt et de force, que l’on n’oublie pas, et parce que sur la forme c’est fait avec beaucoup de soin et d’application. 4.5 pour les quelques longueurs, les quelques scènes un peu inutiles, sachant que le film aurait finalement, vu ce que l’on voit à l’écran, put durer plus légitimement dans les 1 heure 15, avec donc un petit quart d’heure de moins.