A une époque où personne de sensé n’aurait misé un franc sur une production dédiée à une des andouilles masquées de chez Marvel, l’éditeur de Comics avait vendu les droits de certains de ses personnages sans vraiment y réfléchir, notamment ceux de Captain America à la Cannon, la célèbre compagnie qui domina le marché du nanard musclé tout au long des années 80. Si on peut critiquer la “méthode Marvel� qu’on retrouve aujourd’hui dupliquée de film en film, on oublie un peu vite la catastrophe que constituait autrefois l’absence de toute méthode Marvel...ou plutôt, le recours à la méthode Golan & Globus ! Dans les grandes lignes, le film respecte comme il peut la biographie bien connue du héros patriote, si ce n’est que Red Skull et ses séides, pour une raison qui m’échappe, ne sont pas nazis mais italiens,. Si on ne traite que de la partie qui se déroule durant la guerre et si on parvient à faire l’impasse sur ses effets spéciaux ringards, le résultat tient encore à peu près la route...du moins, on voit Captain America dans son costume (kitsch) balancer son bouclier (limitations techniques oblige, on ne voit que le début du mouvement et l’impact en gros plan) à la face de Red Skull (pas trop mal fichu, lui, c’est un exploit). Une fois dans le présent, le film succombe au travers de tous les mauvais films qui ne savent comment faire pour repousser le moment où ils devront s’atteler à une vraie scène d’action : Steve Rogers, joué par un gaillard au charisme d’endive dont l’unique titre de gloire est d’être le fils de l’écrivain J.D. Salinger, ne fait rien, ou pas grand chose, et surtout pas enfiler son costume ou utiliser son bouclier : il se contente de promener sa grande carcasse ahurie parmi des personnages qui ont tous pour mission de faire durer le film quelques minutes de plus en débitant leurs lignes de texte d’un air faussement concerné. Une fois en Italie, Captain America aggrave encore son cas, et la qualité du film s’abaisse encore jusqu’au stade semi-légendaire de l’europudding bondien mâtiné de mauvais film de promotion touristique, qui culmine dans une bagarre finale au coeur d’un château italien en ruines, où on s’attend à tout moment à voir surgir Bud Spencer et Terrence Hill au détour d’un chemin de ronde : en tout cas, voilà qui rappelle à quel point la Cannon constitua peut-être l’ultime représentant (américain) du cinéma populaire européen des années 60-70. De ce navet d’action dont le principal problème est plus la vacuité absolue que le ratage (pour rater quelque chose, il faut au préalable le tenter), qui n’a même pas l’excuse d’être involontairement comique et dont on se demande comment il n’a pas éliminé toute possibilité de tourner des film de Super-Héros pendant plus longtemps, on parvient quand même même à tirer quelques constats positifs : s’il avait été développé sous forme de série, il n’aurait pas été plus mauvais que ce qui occupait les ménagères à cette époque (faut dire que les séries d’action de ces années là étaient sacrément pourries) ...et si on le compare à l’autre Marvel non-canonique des années 90, la bouille abstraite que furent ces “Quatre Fantastiques�, tourné juste pour que les producteurs allemands ne perdent pas les droits sur les personnages et qui ne sortit jamais officiellement au cinéma, on pourrait presque lui dégotter quelques qualités…!