(…) Le film a plusieurs mérites : il est très entraînant, ne souffre d’aucune longueur, si bien qu’on ne voit pas l’heure passer ; évidemment, la mise en scène de Ford est toujours parfaite dans sa sobriété, le noir et blanc toujours somptueux (là où les couleurs de La charge héroïque était parfois trop ‘colorées’), et les paysages comme toujours filmés avec amour. De beaux moments poétiques et lyriques habituels (les chansons entonnées par les chœurs, etc), mais aussi de grandes scènes d’attaque au suspense fort, dont l’apogée est celle du dénouement dans l’église – dans laquelle quelques plans de point de vue de personnages à travers une croix rappelle l’esthétisme expressionniste d’autres Ford, comme La Prisonnière du Désert. Là, le suspense est double : les petits enfants Américains ont été kidnappés par les Indiens, mais de plus, le fils du héro, encore inexpérimenté, est parti les sauver.
Mais au-delà de ces considérations visuelles et rythmiques, Ford traite dans Rio Grande traite des thèmes de la filiation et de l’amour avec tendresse et sagesse. Il saisit le cliché du personnage habituel de John Wayne, à savoir l’homme dévoué à sa patrie et à son rôle militaire, et le place face à des situations difficiles : quand sa femme revient le voir après 15 ans de séparation, il voit ressurgir un vieux dilemme, celui du choix entre l’engagement dans la cavalerie et l’engagement dans le mariage. Il en est de même pour son fils, qu’il n’a pas vu non plus depuis cette date, et qu’il retrouve par hasard dans son régiment. Ces fantômes du passé sont bien mieux traités que dans La charge héroïque (le film précédent de la ‘trilogie’), puisqu’ils sont même au centre du film, et donnent lieu à la fois au drame, à l'humour, à la romance et au suspense. Donc, en plus de l’aspect esthétique, de la poésie habituelle, le scénario est très réussi, avec des thèmes forts bien traités, auxquels s’ajoute une série d’autres intrigues secondaires.
Ma note : 9/10