Valmont est une adaptation assez libre du livre de Choderlos de Laclos, un film mal-aimé à sa sortie, un peu réévalué depuis, mais enfin jamais de façon très significative. Pour ma part c’est un joli film en costume, mais qui malgré son budget bien supérieur n’équivaut pas la version de Frears.
Plusieurs raisons à cela, et la première formelle. Certes le film est beau, avec de jolies décors, une belle reconstitution d’époque, des costumes soignés, une photographie élégante, mais Valmont conserve un caractère engoncé assez gênant. Le film peine à dépasser le caractère papier glacé de ses images, il manque de souffle, d’émotion, de sensualité aussi (une seule scène vraiment sensuelle dans ce film, c’est peu, et encore ce n’est pas énorme), du coup le métrage peine à séduire outre mesure. D’ailleurs la mise en scène appliquée de Milos Forman n’a pas le caractère flamboyant et exubérant qui aurait sied à ce sujet, emballant son film avec l’efficacité qu’on lui connait, mais en restant tout de même trop académique. Pour tout dire, Valmont est donc un spectacle élégant, mais consensuel, où les sentiments, bons ou mauvais d’ailleurs, sont passés derrière la qualité plastique. La bande son est elle aussi très classique, mais pas du tout désagréable.
L’histoire est aussi moins poignante que dans le livre. Il y a beaucoup moins de méchanceté, de violence, de piquant dans cette version qui semble vouloir épargner tout le monde ou presque ! Il en résulte une dernière partie assez décevante. L’histoire se laisse suivre bien sûr, car elle profite des bonnes idées de l’œuvre originale, surtout dans sa première partie, mais c’est clair que les ajouts spécifiques du film ne sont pas les plus mémorables qui soient. Cela étant, il y a de beaux passages, une petite pointe d’humour pas déplaisante, tout n’est pas désagréable, loin de là, mais c’est sûr qu’entre un manque d’émotion manifeste et une histoire plus « happy » qu’on ne l’attendait, il en résulte un côté un peu trop tendre !
Le casting est très propre, avec des acteurs que l’on pouvait attendre dans ce registre film en costume ! C’est le cas de Colin Firth, étonnant en séducteur, qui apporte une certaine douceur à ce personnage de Valmont. Il surprend à mon sens, mais il n’est justement peut-être pas assez piquant, tout comme Annette Bening, ce qui ne les empêche pas de distiller une belle subtilité de jeu, et de convaincre. Leur duo est intéressant, et finalement ils collent bien à l’image plus aimable de cette version de Forman que Close ou Malkovitch ! Pour le reste belle présence de Meg Tilly, actrice que je trouve généralement très convaincante et dont je regrette que sa carrière ait été un peu légère compte tenu de son talent. On appréciera aussi des seconds rôles prestigieux, une charmante Fairuza Balk, et le solide Jeffrey Jones qui, apparaissant peu, ne retient pas moins l’attention.
En fait Valmont est un film moins radical que le livre dont il est une adaptation libre. Et c’est à la fois ce qui fait son identité et sa faiblesse. C’est un très beau métrage sur la forme, on retrouve le soin plastique que Forman accorde à ses œuvres, et le casting est de qualité, mais ça manque d’émotion, de souffle, bien que le film n’en soit pas complètement dépourvu. Mais enfin, d’un livre si sensuel et méchant, c’est un peu dur de se retrouver avec un métrage si soft ! 3