Découverte très particulière que ce film car il bouleverse légèrement les codes utilisés par Monsieur Leconte habituellement. Vu pour la première il y a des années, je l'ai revisionné hier. Force est de constater que certaines séquences restent en tête (l'introduction
-la mort de Michèle Laroque-
, les débats sur les femmes, la scène de Jean Rochefort, etc...). Il s'agit donc d'une curiosité tristement et injustement oubliée.
J'apprécie tout particulièrement Patrice Leconte pour ses oeuvres poétiques et dramatiques (« Le mari de la coiffeuse », « Monsieur Hire », et plus tard « Rue des plaisirs », « La fille sur le pont »...), plus que pour ses comédies. Quoi qu'il en soit, il va sans dire que la poésie ne quitte jamais ses oeuvres, même pour des films plus ambitieux comme « Ridicule » et... comme celui-ci !
« Tango » est une oeuvre ambitieuse en ce sens qu'il sort légèrement de ses spécialités pour « concurrencer » un grand maître, je parle bien entendu du grand Bertrand Blier. On ne peut éviter le parallèle.
En apparence, « Tango » semble nous promettre les bases « classiques » du Leconte qu'on connaît et qu'on adore ! Une sorte de road trip aux personnages limités (en nombre) avec un casting aux merveilles car pour cela aussi, Monsieur Leconte a du goût. Nous allons pourtant être surpris, agréablement ou pas selon les goûts. Pour ma part, j'ai adhéré à du 80% !
En ce film, nous y trouvons des situations absurdes qui ne semblent choquer personne, nous y entendons des débats trop intéressants pour s'immiscer dans nos discussions personnelles.
Nous y découvrons le vide remplissant certains personnages (on y découvre comment le vide peut justement « remplir », comment ce vide peut nous remplir sans qu'on s'en rende compte).
Tout ça très justement accompagné par ... du tango ... tiens tiens voilà qui est étrange.
Encore une marque de fabrique de Patrice Leconte : le bon choix musical !
Forcément, sont également au rendez-vous une pléiade d'acteurs talentueux qui attire le spectateur fort justement.
Où ce film m'a-t-il perdu ces 20% (mes 20% car cela n'engage que moi) :
Le film se compare, de par ses ingrédients, au travail de Blier... Le souci, c'est que c'est trop « gentil » pour être du Blier... Attention, je ne dis pas que Patrice Leconte fait du cinéma « gentil », Leconte fait du Leconte et Blier fait du Blier.
Le cinéma de Leconte n'a d'ailleurs rien de gentil, adorant l'humour noir et la violence autant que la comédie et la poésie.
Le souci, c'est qu'en entrant dans les codes de Blier (par exemple, par la scène grandiose du restaurant où l'on rencontre le personnage de Madeleine incarné par la toute belle Judith Goldrèche, ou encore la scène de la fabuleuse réplique de Rochefort et j'en passe), on s'attend à un apogée macabre qui ne viendra pas. Il suffit de comparer l'incomparable (diront certains), prenez le final de « Tango » et le final de « Préparez vos mouchoirs », vous comprendrez le manque que j'ai ressenti.
Les acteurs :
Quel plaisir de tous les retrouver réunis en un même film !
Richard Bohringer est un acteur que j'affectionne tout particulièrement, son rôle est :
finalement le plus « équilibré » de tous, qui l'eût cru en voyant la scène d'introduction
. Aucune fausse note dans son jeu, comme d'habitude !
Philippe Noiret, notre maître à tous ! Pas la première fois qu'on a le plaisir de le voir dans ce style d'oeuvre, pas la dernière non plus (// les côtelettes, dernière allusion à Bertrand Blier, je m'arrête, promis). Thierry Lhermitte, belle prestation même si certaines scènes semblent le dépasser un peu (ça le change de ses habitudes avec Monsieur Leconte « Bronzés et Cie »), oh mais j'y pense .. « La femme de mon pote » réalisé bien avant, ne serait-ce pas encore un film de Bertrand Blier ... Ah zut, raté...:)
Jean Rochefort, ah ce regretté Jean Rochefort... Je crois qu'il nous offre la meilleure scène du film ! Leconte et Rochefort, quelle rencontre ! Ils le savent qu'ils sont bons ensemble, ils le sentent, ils se connaissent par cœur. Quel bonheur ! Quelle leçon !
Les personnages féminins, bien que plus effacés sont maîtrisés, Miou-Miou comme d'habitude parfaite (sens propre et figuré), Michèle Laroque égale à elle-même et Judith Goldrèche très impressionnante, également l'une des prestations que l'on va retenir.
Comme je l'ai dit plus haut: ce film est une curiosité ! Je ne peux que vous encourager ... à être curieux !