Après le succès du Goût des Autres (quatre Césars dont celui du meilleur film, une nomination à l'Oscar et un David di Donatello du meilleur film étranger), le tandem Jaoui-Bacri se reforme à nouveau ici, pour une sixième collaboration, et se consacre une fois de plus au thème des apparences, déjà bien indiqué par le titre: Comme une image.
A nouveau, les "Bajac" dénoncent un microcosme social basé sur les apparences, les lois du paraître poussées jusqu'à l'absurde: ainsi pour une chanteuse se préoccupe-t-on plus de ses mensurations que de ses cordes vocales.
Celle qu'on peut considérer comme "l'héroïne" du film, Lolita Cassard, une jeune fille de vingt ans, souffre justement d'un physique ne correspondant pas aux normes de beauté des magazines de modes. Par ailleurs, la notoriété de son père, écrivain reconnu, lui pose également problème: Lolita est perpétuellement considérée comme "fille de...", on ne s'intéresse à elle qu'une fois que l'identité de son père est connu. Malgré ces deux handicaps, la jeune Lolita tente, comme elle peut, de faire sa vie: entre cours de chants, soirées et vie sentimentale en forme de point d'interrogation.
Autour de cette Lolita gravite toute une constellation de personnages, récurrente des scénarios du couple: l'écrivain Étienne Cassard donc qui, bien qu'il soit reconnu comme une référence, n'a pas "écrit une seule ligne depuis six mois, Sébastien, un jeune journaliste qui s'intéresse à Lolita, Pierre Miller, un jeune écrivain en herbe, qui, alors que son troisième roman (justement intitulé Comme une image) vient de paraître, connaît une période de doute(s), Sylvia, enfin, la compagne de ce Pierre Miller, et qui n'est autre que la professeur de chants de cette même Lolita.
Mais il faut dire que, malgré l'intérêt légitime qu'on peut porter aux thèmes des apparences, de la comédie sociale, des commérages de basse-cour et du "qu'en dit-on" ou "qu'en dira-t-on", Comme une image déçoit légèrement par un ton un peu trop démonstratif (je fais plus de 70 kilos et les gens se moquent de moi: c'est pas bien), des baisses de régime fréquentes niveau rythme et des scènes sentimentales entre Lolita et Sébastien qui flirtent (trop) souvent avec une mièvrerie larmoyante de bon marché.
Néanmoins les "Jabac" prouvent une nouvelle fois et avec efficacité leur sens aigu du dialogue ("KARINE- Essaye-le quand même! LOLITA- Je sais même pas si je rentre dans la cabine...; ÉTIENNE CASSARD- Mais tu crois sérieusement qu'un petit bout de viande pris à 13h47 va changer tout ton régime alimentaire?"), ce qui aura su séduire Quentin Tarantino, alors Président du Jury, et ses compères au Festival de Cannes de 2004, dont le film est quand même reparti avec le Prix du Scénario.