En dehors de ses comédies satiriques et de ses polars miteux, l’inénarrable Jean-Pierre Mocky a également touché au cinéma fantastique, et avec un certain succès puisque ce “Litan� a remporté rien moins que le prix de la critique à Avoriaz en 82. A sa décharge, on peut reconnaître que l’explication du mystère reste encore plutôt originale aujourd’hui. Bon point aussi pour cette ville médiévale (Anonnay, en Ardèche) envahie par la brume (au point que tout le budget “effets spéciaux� a sans doute été englouti dans des diffuseurs de brume artificielle!) et plongée dans les célébrations bruyantes d’un carnaval qui dissimule la folie réelle des habitants. En revanche, en ce qui concerne tous les autres aspects du film, on retrouve les méthodes de travail d’un Mocky pas encore devenu “underground� mais officiellement sur la voie y menant : Il est vrai qu’au début des années 80, on devait sans doute moins ressentir la facture fauchée d’un film fantastique...puisque par définition, presque tous les films fantastiques locaux étaient fauchés ! On fera donc preuve de bienveillance vis-à-vis des effets spéciaux ridicules, des bagarres qui n’ont rien à envier aux films avec Bud Spencer et des noms des personnages et enseignes commerciales en anglais, preuve que le film ambtionnait une carrière internationale. En revanche, la science du montage toute personnelle de Mocky est ici une véritable nuisance : ainsi, dès les premières minutes, on a l’impression d’être déjà à la moitié du scénario puisque sans le moindre préambule, au bout de cinq petites minutes, Mocky acteur et Marie-José Nat se retrouvent en train de cavaler dans toute la ville à la poursuite (ou poursuivis par ?) de mystérieux individus, la faute à un script dont Mocky réalisateur se contrefout tout autant que dans ses autres films Si le premier contact est un peu perturbant, on cesse bien vite de s’inquiéter du pourquoi du comment et d’essayer de comprendre pourquoi on dit dans le film que les corps disparaissent quand ils sont touchés par les trucs bleus électrique qui vivent dans l’eau, alors qu’à l’image ils ne disparaissent pas...et on commence à se poser des questions autrement plus intéressantes comme le fait de savoir si le commissaire est un acteur étranger qui parle français, ou un acteur français qui imite un accent étranger pour une raison connue de lui-seul, ou pourquoi Nino Ferrer ressemble autant à une version juvénile de Bill Nighy. Pourtant, si le résultat final est bordélique et peu compréhensible, il possède aussi un certain charme, en raison de son atmosphère de folie très particulière (qui semblera surjouée et artificielle aux esprits les plus cartésiens) et du je-m’en-foutisme ludique et décomplexé du réalisateur. Ce nanard de la grande époque est à réserver à un public averti...comme beaucoup d’autres films de Mocky, on pourrait dire…!