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RED JOHN
15 abonnés
54 critiques
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4,5
Publiée le 12 décembre 2024
Je dois avouer qu'avant de regarder "Un homme qui dort" (1974), adaptation en noir et blanc du roman éponyme (ayant pour thèmes la dépression nerveuse et la solitude existentielle) de Georges Pérec, j'avais un a priori négatif. Je m'attendais en effet à ce qu'il s'agisse d'une des innombrables productions creuses et prétentieuses du cinéma d'auteur parisien. Or j'avais tort : conçu d'une main de maître, ce voyage contemplatif et initiatique au bout de la déréliction s'avère fascinant. Le texte de Pérec est superbe, mais ce sont surtout les aspects visuel et sonore du film qui lui confèrent sa beauté envoûtante, totalement atypique. Sur le plan visuel, la mise en scène de Bernard Queysanne regorge d'idées brillantes et innovantes, d'une grande force poétique. S'y mêlent les influences de l'art abstrait, du surréalisme et du pop art. Sur le plan sonore, la musique, les bruitages et surtout la voix de Ludmila Mikaël exercent un pouvoir hypnotisant. "Un homme qui dort" est une réussite surprenante et fait partie de ces oeuvres révolutionnaires qui ne font pas école, car chacune d'elles est et restera unique en son genre. Un pur OVNI cinématographique, que l'on peut voir (ou même écouter en fermant les yeux) et revoir indéfiniment en y découvrant toujours de nouvelles richesses.
Ce film-ovni, que l'on peut qualifier d'expérimental, est une adaptation du roman éponyme de Perec. J'ai le souvenir d'une expérience cinématographique extraordinaire. Le film mêle réalisme et poésie dans un noir et blanc qui capte aussi bien le trivial que la beauté. Cet étudiant qui se détache progressivement du monde se livre à la plus belle errance du cinéma, rythmée par la lancinante voix-off de Ludmilla Mikael.
Un homme qui dort, un homme qui veut s’effacer du monde.
Adapter le roman littéraire de Georges Perec était un risque, malheureusement je suis dubitative quant à l’équilibre fragile de ce film. Le travail au niveau du son est d'une richesse époustouflante tandis que l'image en dit beaucoup moins, c'est peut-être l'intention de l'auteur de donner en représentation un acteur désincarné pour appuyer son propos, mais pour ma part j'ai eu le ressenti que l'on pouvait se passer de l'image, que le film pouvait se lire comme un livre.
Le film se déploie sur la voix off, qui offre une richesse à travers son langage poétique, parfois brutal ou encore décousu. Le temps et la solitude sont les thématiques principales du film, l’homme qui dort est en pleine fuite existentielle face au temps qui passe, cet élément est d'ailleurs sans cesse mis en avant notamment à travers les bruits de pas, les gouttes du robinet ou encore les battements de cloche.
Derrière cette vie ennuyante et routinière à laquelle l’homme semble insensible, se cache une profonde angoisse existentielle. Alors, la fin du film prend un tournant saisissant, bien qu'il ne se transcende pas dans son existence il devient un être sensible au monde, il n'est plus spectateur de lui-même, c'est-à-dire d'un être démuni de toute substance, il devient sujet et prend en charge son existence. L'accélération et le ton crescendo de la voix off traduit une sensibilité qui s'exacerbe, et cela grâce au temps qui passe. Il ne subit plus la vie, il n'éprouve plus non plus d'indifférence face à celle-ci. Il en attend d'elle, comme il attend que la pluie tombe.