Il y a des films cultes qui, du temps où ils étaient présentés, suscitaient des commentaires. De nos jours, le Vendredi 13 de Cunningham ravira au mieux les nostalgiques, au pire fera bailler la nouvelle génération et en grande majorité l’ancienne. Le problème n’est pas tant que le film soit un nanar au scénario inexistant, adossé à une psychologie aussi poussée que ne l’est celle d’un Femme actuelle ou d’un Paris Match, mais par un montage, une construction, vide et ennuyeuse. Simplet, le long-métrage divisé en deux temps - une scène de meurtre, une scène de « remplissage » – ne permet jamais de surprendre le spectateur. Mais le plus navrant, pour l’amateur du genre, et pour ses théoriciens, est l’apparition du genre du slasher qui doit être compris dans son rapport sociologique et esthétique. Le problème, c’est que le film d’horreur américain des années 80 est, en grande partie, une tentative de démocratiser le sentiment d’angoisse pour le rendre plus accessible. Plus ambigu, le film punit, la plupart du temps, un acte sexuel chez l’adolescent ou le jeune adulte : il faut donc se poser la question du conservatisme dans le genre, parallèlement à celle d’une morale populaire. En outre, le film est peu terrifiant, jamais dérangeant, contrairement au cinéma d’horreur des années 70, beaucoup moins accessible par sa forme et par son contenu. Alors que le Massacre à la tronçonneuse montrait un spectacle gratuit, épouvantable, contraire à la raison, Vendredi 13 propre un slasher d’ados qui, entre scènes de sexe bon à frétiller les sous-vêtements de son public prépubère et de le terrifier avec des scènes de sang aussi effrayantes qu’un train fantôme à la foire du trône, l’Horreur, telle qu’elle est dans l’esprit de l’Homme, est ici remplacée par un spectacle où l’horreur, devenue accessible, est par conséquent dépolitisée, déshumanisée dans sa réflexion autour de l’Homme né comme monstre. Le slasher, qu’il soit Vendredi 13 ou Freedy, est le fast food de ce que le Massacre ou Orange mécanique est à la haute gastronomie.