Ma principale motivation à aller voir ce film, était de chercher à comprendre comment à un mois de mai 1968, on pouvait interdire un film pour amoralité et insanité. Il est vrai que "Mai-68 allait révéler brutalement la nature de la censure gaulliste", inaugurant une spectaculaire "libération culturelle".
Pour revenir au film, il n’est pas dans la meilleure veine de Marcel Carné… A l'évidence, Marcel Carné était en perte de vitesse à la fin des années 1960, et il se devait de rebondir... avec la tentation de refaire « Les tricheurs » sorti 10 années avant avec le succès que l’on connaît...
On suit un jeune gigolo, Alain, dont la beauté n’égale que l’ambition interprété par Christian Hay, qui n'est pas un acteur, mais un photographe de plateau qui a tapé dans l'œil de Marcel Carné …son personnage, issu d’un milieu modeste, ne vit que de ses charmes en se faisant entretenir par de riches femmes. Rétif à toute forme d'autorité, il décide de ne pas travailler. Il vit avec une princesse, qui lui fournit la belle vie, jusqu'à ce qu'il rencontre une autre jeune femme, Sylvie ,( interprétée par Haydée Politoff) jeune femme vive et libre, naïve au possible, et qui croit à un grand amour….Leur chemin croise Chris, (Yves Beneyton) hippie issu de la haute société, pleinement engagé dans un élan de contestation de la société, qui annonce mai 1968…et irrésistiblement attiré par Sylvie…Leur trio va vite se confronter aux ambiguïtés et aux dangers d’une vie trop moderne pour l’époque…
Après 1h45 de film, je suis sorti sans n’avoir pu comprendre, ce qui a pu guider les ciseaux de la censure…il y a une scène de sexe très soft et relativement bien filmée, à part l’amoralisme d’Alain, je ne vois rien d’autre !!
Il faut dire que censure ou pas, « Les jeunes loups » est peut-être son plus mauvais film, et certains critiques n’ont pas hésité à le trouver d'une nullité absolue ce qui est autant excessif...A l'inverse le Masque et la Plume fut un défenseur du film.... Il faut reconnaitre que la représentation de la jeunesse des années 1960 a étonnamment mal vieillie…En prenant de l’âge, Carné est de plus en plus fasciné par les jeunes loups, dont les aspirations et les mœurs semblent si nouvelles…Il a perdu son côté poétique, mais tient à conserver un côté branché, en plaçant sa caméra dans les lieux à la mode, The Cage, rue de Rennes, Chez Popof, rue de la Huchette…un tour de Paris by night dans des endroits où le bruit est assourdissant, où les jeunes dansent le jerk et d’autres danses encore plus à la mode…Cela finit par fatiguer...
On ne perçoit aucune subtilité, et ça passe aussi par des dialogues qui sont abominables, car il faut dire que les acteurs, tous, y compris Maurice Garrel qui a un petit rôle, sont consternants, et on dirait qu'ils lisent un texte, sans aucune émotion., avec une diction qui pour nous est d’un autre temps…Christian Hay, qui n’est pas un comédien ne fera pas carrière…son jeu très emphatique, et son phrasé surligné, irritent même si sa présence devant la caméra est indéniable…
Bref, Carné finira par renier son film, méconnaissable après les coupures ordonnées par la censure…et pour la première fois, il ne se rendit même pas à la première…Et l'on peut se dispenser de le voir, sauf si l'on s'en tient à l'intérêt ethnographique ...