Les années 2000 ont marqué un tournant dans la vie artistique de Robert Rodriguez : après avoir tourné The Faculty et produit les éternelles suites d'Une Nuit en enfer, il a découvert les joies nouvelles de la réalisation numérique, annonçant son virage futur vers le tout en 3D dès la débâcle Spy Kids 2. Revient à cette conclusion de trilogie la tâche difficile d'aller encore plus loin dans le délire, ce troisième épisode décidant, cette fois, de tourner plus de la moitié de son film dans des décors entièrement artificiels.
Et si l'on passera outre les invitations faîtes au spectateur pour qu'il mette ses lunettes (sûrement est-il trop stupide pour comprendre), le premier niveau de ce jeu-vidéo mêlant 3D pure et live-action drôlement incrusté pourra choquer la rétine : entre effets sonores datés (l'on croirait écouter des bruitages de vieux jeux de Play One) et design des décors douteux, les plus fragiles d'entre nous frôleront la crise de nerf s'ils ne parviennent pas à s'adapter à ces décors hauts en couleurs et pétaradants d'excès imaginatifs, à l'instar de ce fameux premier niveau où les personnages bondissent sur des genres de marteaux piqueurs à propulsion, et qui affichera une gestion de l'espace et de la hauteur purement affreuse.
Heureusement, on se fait vite à l'expérience visuelle, et si l'on parvient très rarement à apprécier ce qu'on voit (si ce n'est certains qui sortent un peu du lot, à l'image de certains trips présents lors de la course en moto), on se prend vite au jeu de l'énumération des tentatives d'innovations présentes tout du long, et qui démontrent, une nouvelle fois, la propension qu'à Rodriguez à se montrer généreux en divertissement pour gosses.
La démarche est appréciable, et tandis qu'il offrait aux enfants un monde miniaturisé ainsi qu'un cochon volant avec son fameux Spy Kids 2 (qui entamait malgré lui la décadence de la franchise), ce troisième volet n'est pas maigre en inventions idiotes et réjouissantes pour les plus jeunes d'entre nous.
Outre ses fameux marteaux piqueurs bondissants, marqueront surtout Stallone et ses clones (qui se donne à coeur joie dans le surjeu et le changement de personnalités), les bécanes en 3D et cette fameuse séquence surréaliste où notre héros, toujours Juni Cortez, affrontera le mécha contrôle par ce qu'on considèrera, au début, comme l'antagoniste du film, jusqu'à ce que son personnage évolue vers ce twist final renversant. Non, il ne l'est absolument pas, et vous pourrez même le prévoir quelques scènes plus tôt.
Un retournement de situation qui permet surtout d'emmener le spectateur vers le véritable twist du film : il concerne le personnage de Stallone, et conduira la saga vers la conclusion la plus idiote, naïve et niaise qu'elle pouvait espérer. On se claque finalement la main sur la gueule, tant pour la simplicité de la fin que pour la manière qu'elle a de nous être amenée, sans chercher à la rendre fluide, ou ne serait-ce que logique. Ne précisons pas qu'elle réunit tous les personnages campés par des acteurs importants vus dans les trois films, et qu'elle affiche un aspect bisounours proprement insupportable, et complètement incohérent avec le scénario que nous conduisait le film.
Il parle ainsi de pardon et de rédemption avec une grande maladresse, avec le traitement naïf de ces films de gosses primaires et qui pensent, non sans se vautrer en même temps, qu'il suffit de faire du débile et du coloré pour plaire aux enfants. C'est oublier que s'ils n'ont pas forcément les mots pour qualifier les défauts d'un tel film (il m'étonnerait d'en entendre parler de montage raté ou de colorimétrie excessivement laide), ils les ressentent autant que les adultes et autres adolescents.
Ainsi, mon cher Robert, quand tu te contentes de nous balancer de la 3D certes pas dégueulasse pour son temps, mais qui nous affiche des incrustations d'acteurs profondément ratées, que tu jettes les couleurs de tes tenues de combat sans chercher de liens logiques ou esthétiques entre elles, et que tu nous assènes de toujours plus de fonds verts visibles et de cette bande-son qui n'a plus rien de l'ancienne personnalité de tes vieux bons films, ce n'est pas qu'on ne trouve plus ce qui faisait le charme de ton art, non, c'est qu'il semble que tu ne sais plus, toi non plus, comment revenir à ce qui faisait ton succès, et l'originalité de ton cinéma.
Se pourrait-il cependant que le quatrième épisode, sorte de sequel à part, soit encore plus mauvais? Cela paraît bien difficile.