En 1929, naissait le héros intergenerationnel le plus célébre de tous les temps, reporter à la houpette celebrissime, accompagné de son acolyte canin fidéle, loyal et intrepide (comme son maître), au journal du petit vingitéme. Hergé, à la réputation controversée, aura marqué le monde de son stylo et de ses crayons, multipliant les personnages aussi originaux les uns que les autres, et mettant en scéne ceux ci dans des situations insolites et impérieuses. Qui pour adapter ces sensationnelles aventures ? Qui pour mettre en scéne en images cette légende de la bande dessinée ? Qui sinon le plus grand réalisateur du cinéma américain ? Personne, evidement. Hergé clamait haut et fort que seul Steven Spielberg, avec sa caméra, pourrait donner vie à son Tintin et ses compagnons. Et c'est chose faite. Spielberg qui, aprés ses antécédents n'avait plus rien à prouver, bouleverse une nouvelle fois toute éthique cinematographique et transcende un public admirateur en réalisant non pas une adaptation lucide, mais un chef d'oeuvre déjà cultissime. Virtuose, précis, magnifique, émouvant, hilarant, rien ni personne n'est laissé au hasard dans cet epoustoufflant "Secret de la Licorne". On y retrouve les Dupond et Dupont, irrisistibles à chacune de leur apparition, dont le génie Spielberg n'a oublié aucun détail -Leur costume, leur canne, leur moustache et leur chapeau melon et evidement le mythique "je dirai même plus" qui ravira les fans de premier ordre (dont je fais parti integrante). Sans oublier l'intriguant et vicéral Sakharine, bougrement inspiré et inspirant, qui fait état d'ennemi impressionnant à l'égar de notre jeune journaliste. Bien sûr, on ne peut ommettre d'évoquer les seconds rôles intelligement intégrés, à l'image d'Allan -L'homme de main le plus infame jamais crée dans l'histoire de Tintin- (véritable figure emblematique qui s'avérera devenir un ennemi de taille au fil du temps et des aventures de Tintin) ici utopiquement inséré, avec son impermeable et sa casquette, et qui en fera baver notre tribu de protagonistes. De même que la Castaphiore trouve sa note, icone de l'opéra, en demeurrant égale à celle que l'on connait dans la BD eponyme : insupportable et incontournable à la fois, brisant le verre de sa corde vocale et sucitant le désarroi du capitaine Haddock. Justement, Haddock. Tonnerre de Brest que cela fait un bien fou de voir les traits de ce vieux marin barbu sous l'emprise d'alcool (avec son ancre imprimée sur son pull bleu marine et en relief sur sa casquette) ainsi représenté, à l'exactitude même qu'Hergé l'avait autrefois présenté. Ivre lorsqu'il boit de l'eau, sobre lorsqu'il est au whisky, ce paradoxe déroutant au coeur de ce monument cinématographique inspire le respect ; mousaillon à ses heures, ancêtre d'un filbustier et téméraire pirate, précépteur à son temps perdu, Haddock marquera son identité au fer dans ce premier opus étincelant. Puis vint l'apothéose, la suprêmacie littéraire, le flamboyant Tintin, accompagné par son fox terrier à poil dur, éclatant littéralement à l'écran. Leur caractére respectif bien trempé, leur soif de danger, leur eternelle curiosité, leur trépidante fidélité mutuelle, assortie à une complicité résistible à tout épreuve. Le visage angélique de l'un, avec la chaleur rassurante de l'autre, l'accoutrement légendaire, la houppe impériale, les dialogues savoureux. Sapresti, on tient bien notre butin du 7éme art, mesdames et messieurs. Tintin et milou, en chair et en os, qui dominent cette fresque infaillible de toute leur immensité. Quant à Spielberg, il fait usage d'une crétivité salutaire, tournant des séquences complexes et formidables (dont une poignée retiennent l'attention pour leur coté surréaliste tant l'exercice semble compliqué), trouvant des transitions subtiles et arborant une mise en scéne fine et trés stylisée. La motion Capture, une grave erreur ? Bande de bachi-bouzoucs, c'est la meilleure idée de ce film (parmis une multitude d'autres encore), tant elle donne vie aux personnages, les rend imperfectibles, enclins à toute éloge, dynamise l'oeuvre avec parcimonie et l'agrémente de tout ce que l'on cherchait à retrouver dans une adaptation de Tintin, à mille lieux sous les mers des premieres tentatives. LA 3D est saisissante, absolument pas dégradante pour le film, n'enléve rien à la qualité esthetique de cette épopée grandissante. Musicalement, la crédibilité de John Williams, malgré ses évidentes similitudes avec "Arrete moi si tu peux", est totalement sauve, les thémes étant aux antipodes du film dans son ensemble : inapperçus, mélodieux et trés doux, bien loin de ceux qui rythmaient la frénétique saga d'Indiana Jones. D'ailleurs, ne nous y meprenons pas, même si dans l'aspect ce Tintin a tout d'un Indiana Jones modernisé, avec ses cascades et son humour proliférant, on est en présence d'une oeuvre qui dispose de sa propre identité, sa trame, son contexte, et se démarque par beaucoup du docteur Jones. Superbe hommage aux vignettes d'Hergé. Génial