Il faut retourner à la fin des années 80 pour comprendre en quoi le film « Batman » a été si influent. A l’époque, point de supers héros qui se bousculent dans les salles obscures. Seul le « Superman » de 1978 (1er film de super héros moderne) a fonctionné et lancé une franchise... qui a rapidement dégringolé. Par ailleurs, l’image de Batman est, dans la pop culture, celle renvoyée par la série à succès des 60’s. A savoir un héros kitsch évoluant dans un univers bariolé, humoristique, et port nawakesque. Ce film de 1989 changera tout cela, rappelant que l’homme chauve-souris est un héros sérieux et troublé. Son succès engendra une batmania pendant toutes les années 90 (suites, séries animées, jouets…), sans véritable concurrence super-héroïque. Mais que vaut le film en lui-même ? Dès les premières minutes, le ton est donné : on est chez Tim Burton. Le réalisateur apporte sa touche visuelle très personnelle, présentant Gotham City comme une ville cauchemardesque, mutante, décadente, et gothique. Et à l’image d’une BO qui mêle des compositions symphoniques de Danny Elfman avec des tubes pop de Prince (!), les visuels mélangent des éléments qui semblent venir de plusieurs décennies, des années 20 aux années 80. Des références au cinéma expressionniste sont d’ailleurs régulièrement présentes, jusqu’au final qui fait du pied à « Metropolis » ! Et contrairement à ce que l’on peut penser en découvrant les premiers personnages du film, il ne s’agit pas d’une origin story du chevalier noir… mais plutôt de celle du Joker ! Batman est en effet ici une figure presque fantastique et animale, qui en est à ses débuts au moment du film. Le choix de Michael Keaton était très osé à l’époque pour incarner Bruce Wayne / Batman, l’acteur étant surtout connu pour ses rôle comiques. La Warner reçut même bon nombre de plaintes avant la sortie du film. Pourtant, Keaton s’en tire très honorablement en justicier sombre et torturé. Face à lui, Jack Nicholson est le choix idéal pour un Joker aussi cartoonesque que menaçant, coloré que psychotique. En revanche, il ne serait pas faux de dire que « Batman » commence à accuser le poids des âges. Il est clair que les combats sont mous par rapport aux films suivants, et que l’intrigue est simple (on est loin des plans machiavéliques et rebondissements à tiroirs de « The Dark Knight »), reléguant par exemple le personnage de Kim Bassinger essentiellement à un intérêt romantique pour le héros et le méchant. Toutefois, ce « Batman » garde une personnalité forte et une ambiance gothique bienvenue, qui sera renforcée dans le second volet.