C'est en prison que le pasteur Harry Powell rencontre Ben Harper, un condamné à mort qui a commis un hold-up et assassiné deux hommes. Pourtant, l'argent du butin n'a pas été retrouvé et Powell est prêt à tout pour mettre la main dessus...
Pour son unique réalisation, on constate assez vite que Charles Laughton est aussi talentueux derrière la caméra qu'il n'a pu l'être devant. Avec The night of the Hunter il livre un film brillant basé sur plusieurs dichotomies où il met en avant le bien contre le mal, les adultes face aux enfants ou encore le jour face à la nuit. L'écriture est de qualité, notamment dans l'avancement de l'histoire mais l'intérêt de cette oeuvre n'est pas là et réside principalement dans son atmosphère, sa beauté formelle et ses personnages.
Dès les premières minutes on va découvrir un Robert Mitchum très à l'aise en psychopathe déguisé en prêtre, qui va user de plusieurs stratagèmes pour tenter de découvrir le positionnement du magot. Laughton reste régulièrement braqué sur lui, mettant en avant la façon dont le mal absolu s'est glissé dans la peau du bien, faisant ressortir par intermittence ses côtés fous et violents. Peu à peu, il met en place une galerie de personnages tournants autour du lui, souvent ne voyant que son habit, à savoir le bien, excepté Jack, le gamin qui connaît la cachette de l'argent qui lui, de suite, voit le mal qui se cache derrière les habits de pasteurs. Des personnages consistants que Laughton dirige avec brio et les mettant en scène de belles manières.
Et pour les suivre, il met en place une atmosphère sombre, onirique et angoissante, parfois très poétique, se rapprochant aussi du fantastique à l'image des chants de Mitchum sur son cheval, traquant les mômes. C'est là l'une des principales réussites du film tant cette succession de dichotomies aurait pu être traité de manières maladroites, ce qui n'est pas le cas avec Laughton, soignant l'atmosphère et rendant son oeuvre envoûtante et haletante de bout en bout, dont le rythme plutôt lent sert le récit et renforce la fascination pour les personnages.
Habile mélange de genres, The Night of the Hunter fait preuve de légèreté, drame, humour ou encore noirceur dont les influences du muet, notamment de Griffith (à qui Laughton a aussi emprunté sa si talentueuse muse Lillian Gish) se font fortement ressentir. Mais la force de cette oeuvre se trouve aussi dans sa beauté formelle où l'on assiste à une succession de magnifiques tableaux, de plans sublimés par des paysages et décors aussi somptueux que la photographie en noir et blanc. Laughton use de divers jeux d'ombres rappelant l'expressionnisme et sa technique, où il enchaîne travellings et plans-séquences, est brillante, jamais lourde et, à l'image de ses inoubliables plans, sert le récit et une atmosphère si forte.
Finalement, le regret qu'engendre The Night of the Hunter se trouve dans le mépris qu'il a eu à sa sortie et qui enchaîna une fin brusque de la carrière de réalisateur de Charles Laughton... Et au vu de sa puissance, beauté, atmosphère, prestation d'acteurs ou encore dimension c'est vraiment dommage.